Dans l’histoire récente d’Israël, curieusement,
les mois de septembre et d’octobre
des années se terminant par le chiffre
trois sont marqués d’événements dramatiques
qui ont profondément bouleversé
la nation. C’est ainsi qu’il y a 30 ans, le 6
octobre 1973, la Guerre du Kipour a été
déclanchée par l’Égypte et la Syrie. Vingt
ans plus tard, le 13 septembre 1993, on a
assisté à l’infâme poignée de mains entre
Rabin et le terroriste Arafat et à la signature
des Accords d’Oslo, dont les conséquences
n’ont cessé de faire couler du
sang juif dans les rues d’Israël. Afin de
nous expliquer les leçons tirées de ces
faits catastrophiques par les instances
supérieures de la défense israélienne
sur le plan conceptuel et stratégique,
nous avons rencontré, en exclusivité, le
Major Général YFTACH RON-TAL, chef
de l’Armée de Terre de l’«Israel Defence
Forces» (IDF).
Tankiste et docteur en droit, le général Ron-Tal a 47
ans et est père de sept enfants, dont l’aîné a 25 ans
et la plus jeune 1 an! Malgré les énormes responsabilités
qui pèsent sur ses épaules, l’homme est resté
simple, direct, souriant et sympathique. Parallèlement
à un discours très profond et documenté, il
fait preuve d’esprit et d’humour.
Le terme «Forces terrestres» est en fait une expression
faîtière pour désigner l’ensemble de cinq départements,
à savoir: les ressources humaines, l’organigramme
et la gestion des troupes (organisation interne
et déploiement des divisions et des bataillons),
les équipements de combat (développement et acquisitions),
la doctrine de défense et de combat (établissement
et enseignement) et l’ingénierie militaire.
Ces grands départements incluent l’infanterie, les
tanks, les parachutistes et les renseignements militaires,
bref tous les aspects de l’armée hormis l’aviation
et la marine. La police des frontières (les
fameux Bérets verts) est partiellement intégrée dans
les forces de police civiles et dans les forces de terre.
Quant à la partie médicale, elle est indépendante en
ce qui concerne l’action directe, mais elle fait partie
du Département de la doctrine de combat pour
ce qui touche à la méthodologie médicale sur le
champ de bataille. L’ensemble de ces éléments fait
que le Major Général Yftach Ron-Tal se trouve à
la tête du commandement de 300’000 hommes !
En ces temps difficilement compréhensibles, son
analyse et son opinion ont un poids particulièrement
important, car elles émanent de l’expérience vécue
au quotidien sur le terrain même.
Nous sommes à la veille du trentième anniversaire
du début de la Guerre de Kipour. Pouvez-vous nous
dire quels enseignements Israël a tirés de cette
agression arabe sur le plan stratégique?
Jusqu’à la Guerre de Kipour, il n’y avait pas d’organisation
faîtière dans le cadre de laquelle toutes les
forces terrestres étaient centralisées, chaque type de
division était indépendant. Or l’une des leçons de
cette terrible guerre réside dans le fait d’avoir rassemblé
l’ensemble des unités sous un seul commandement.
C’est là l’enseignement et la conséquence
essentiels de la guerre de 1973. Il faut bien comprendre
que sur un plan purement militaire, il s’agit
d’un changement majeur qui permet, le cas échéant,
une meilleure coordination et surtout une plus grande
efficacité.
Depuis peu, les États-Unis sont installés militairement
au Moyen-Orient. Sur le plan stratégique, quelle est votre évaluation de cette nouvelle situation?
La victoire militaire des Américains en Irak a créé
une nouvelle réalité dont les effets peuvent être ressentis
dans le monde entier, mais plus particulièrement
au Moyen-Orient, car elle affecte directement
nos relations avec les Arabes palestiniens qui vivent
ici. Aujourd’hui, il n’existe plus ni nation ni armée
irakiennes. Il est possible qu’avec le temps, ces forces
soient effectivement reconstituées, mais actuellement,
elles ont simplement disparu. De plus, ce
que nous appelons l’axe nord, qui comprend le Liban,
le Hezbollah, la Syrie, l’Irak et l’Iran, ira en
s’affaiblissant tant qu’il y aura une présence américaine
dans la région. Il est très important pour nous
que ce processus évolue positivement, car cela nous
permettra éventuellement, avec le temps, de procéder
à une réévaluation de notre défense de la frontière
nord, sans que nous relâchions notre vigilance
pendant un seul instant. À ce sujet, je voudrais souligner
que depuis que nous sommes sortis du Sud-
Liban, la situation dans cette région est devenue
plus compliquée. En effet, si nous devons intervenir
par voie terrestre au Liban même, nous aurons plus
de difficultés que par le passé, lorsque nous y étions
installés. Nous n’avons pas la moindre intention de
tolérer des agressions dirigées contre notre population
du nord. Que ce soit le Hezbollah ou son sponsor
la Syrie qui nous attaque, nous répondrons avec
la plus grande sévérité aussi bien à l’un qu’à l’autre,
partout là où il sera nécessaire de frapper. Cela dit,
nous vivons une situation fondamentalement paradoxale.
En effet, si l’on regarde l’évolution de nos
relations avec les États arabes avoisinants, nous
constatons qu’en fait, depuis la fin des années 70 voire
le début des années 80, nous vivons dans un environnement
relativement pacifique et stable. C’est le
cas sur le front sud face à l’Égypte, sur le front est
face à la Jordanie et je dirai même qu’au nord, nous
n’avons pas connu de problèmes majeurs avec la
Syrie, bien qu’elle mène contre nous une guérilla
larvée par l’entremise du Hezbollah et ce en étroite
collaboration avec l’Iran. Par contre, et c’est là où le
paradoxe est frappant, nous observons quotidiennement
deux types d’agressions et de dangers. Le premier,
le terrorisme, qui, jour après jour s’attaque aux
fondements mêmes de la société israélienne. Le
second, la course aux armements des États musulmans,
y compris l’Égypte, dont le danger principal
réside dans la recherche effrénée de l’acquisition de
l’arme nucléaire. Le Pakistan la possède déjà, l’Iran
s’en rapproche à grands pas, la Libye met tout en
œuvre pour l’obtenir et nous avons de bonnes raisons
de penser que l’Arabie saoudite s’est également lancée dans la voie de la nucléarisation de ses
forces armées. Ces deux éléments, le terrorisme et la
nucléarisation du Moyen-Orient, constituent deux
défis qui ont été relevés par les États-Unis et qui
sont activement combattus. L’Amérique, en particulier
depuis les attentats du 11 septembre 2001, a
compris que le terrorisme est un fléau mondial qui
ne frappe pas uniquement Israël et, parallèlement, a
entrepris les actions qui s’imposent afin d’éviter que
certains États, en particulier l’Iran, ne puissent accéder
à l’arme nucléaire. Quant à nous, nous avons
bien entendu conscience de ces problèmes et faisons
le nécessaire afin de nous protéger et de prévenir
une catastrophe éventuelle.
Revenons à la question du terrorisme. Une étude
parue au mois d’août 2003 a démontré que depuis le
mois de septembre 2000, il y a eu plus de 18’000
attaques, dont la majorité a pu être évitée. Comment
pensez-vous que cette situation va évoluer?
Avant de vous répondre sur un plan opérationnel, je
dois rappeler un certain nombre de réalités fondamentales.
Le conflit entre les États arabes et Israël a
de nombreux aspects, aussi bien religieux que politiques,
mais en définitive, il s’agit avant tout d’une
question territoriale. Le différend est tellement
capital, tellement essentiel, qu’il ne peut pas être
résolu par une solution globale ou générale. Les
États arabes environnants n’ont jamais abandonné
leur intention de dominer les terres d’Israël et de
voir l’État juif disparaître en tant qu’entité politique
indépendante. Je peux donc affirmer sans
hésiter que tant que cette volonté existera chez nos
adversaires, les Juifs ne pourront pas vivre en paix
dans leur patrie. Dans cet esprit, je pense aussi que
le cycle du terrorisme arabe dirigé contre nous doit
être brisé et vaincu. Cela dit, je ne crois pas que nous
arriverons à éradiquer totalement le terrorisme.
Nous vivons ici avec ce fléau depuis 1881, dès la première
immigration (Alyah Rishonah), en fait depuis
que le peuple juif a décidé de retourner vivre sur ses
terres. Par conséquent, le terrorisme constitue une
arme bien connue des Arabes palestiniens, puisqu’ils
s’en servent depuis plus de cent ans. Il y a trois
ans, à l’initiative et sous la direction d’Arafat, ils ont
pris la décision militaire et stratégique de relancer
une campagne de terreur contre la population israélienne
afin d’obtenir des avantages politiques et territoriaux.
Ils ont donc décidé que le terrorisme serait
l’arme principale de toute leur action afin de nous
vaincre. Or, comme je vous l’ai dit, je ne pense pas
qu’il soit possible de supprimer le terrorisme dans
son ensemble. Toutefois, il est de notre devoir de
tout mettre en œuvre, en particulier sur le plan militaire, afin de faire comprendre à nos adversaires
qu’ils n’obtiendront rien, aucun avantage, si le terrorisme
reste leur arme principale. Nous avons plusieurs
moyens de les mener à ce changement d’attitude.
Bien entendu par la dissuasion militaire mais,
sur un plan plus général, nous devons profiter d’un
environnement favorable. Le monde entier, et en
particulier les États-Unis, admet aujourd’hui que le
terrorisme n’est pas l’arme des faibles, des soumis
ou des combattants de la liberté, voire des résistants,
mais bien une forme d’agression illégale et lâche qui
met en danger le monde libre tout entier. Actuellement,
l’Amérique mène un combat contre le terrorisme
qui a débuté par la phase I en Afghanistan,
qui a continué par la phase II en Irak et qui poursuit
sur sa lancée. Pour Israël, la situation actuelle constitue
une occasion qui peut-être ne se représentera
pas de sitôt, pour mener à bien son combat contre le
terrorisme palestinien.
Sur le plan opérationnel, je ne peux évidemment pas
révéler publiquement ni en détails la nature de nos
interventions. Toutefois, je peux vous affirmer que
la guerre contre la terreur est un combat de tous les
endroits et de tout moment. Il n’y a pas de zones
neutres. Tous ceux qui sont liés de près ou de loin au
terrorisme sont combattus de la manière la plus sévère,
en particulier les dirigeants des organisations
terroristes. Il est vrai que nous menons une lutte très
dure sur le terrain, mais elle doit être accompagnée
d’un changement radical de leadership dans la société
palestinienne. Je suis convaincu que la majorité
de la population arabe qui habite en Judée-Samarie-
Gaza n’aspire en fait qu’à une chose: vivre tranquillement
afin de pouvoir travailler et nourrir les familles
nombreuses. J’irai même plus loin en disant
qu’une bonne partie de ces gens est fatiguée et en a
assez de la politique du terrorisme et de ses conséquences
qui leur est imposée par l’autorité de l’Olp.
Les palestiniens doivent choisir un leadership disposé
à travailler avec nous dans la lutte contre le terrorisme.
Abou Mazen a été le premier lieutenant
d’Arafat pendant trente ans et il est donc difficilement
pensable qu’il y ait des divergences de conceptions
stratégiques ou politiques entre eux. Parallèlement,
il est impératif d’expulser Arafat car, tant
qu’il sera présent dans la région, aucune évolution
positive ne pourra être envisagée. D’ailleurs, sur le
plan international, nous sommes aujourd’hui dans
une position où nos actions militaires et notre lutte
contre le terrorisme sont mieux comprises que
jamais. Afin d’illustrer mes propos, je dirai que si
demain les États-Unis disposaient d’une information
vérifiée disant que Bin Laden ou Saddam
Hussein se cachait dans un immeuble désigné de
Gaza rempli de civils, femmes et enfants, ils n’hésiteraient
pas un instant à bombarder cette maison
avec tous ses habitants. C’est entre autres pour cette
raison que je pense que nous n’avons pas besoin d’avoir d’états d’âmes démesurés dans notre combat
contre les chefs du terrorisme. En ce moment, nous
luttons sur tous les fronts et par tous les moyens
contre le terrorisme arabe et mettons tout en œuvre
pour décapiter les organisations terroristes. Mais
nous agissons aussi dans un autre but, celui de faire
comprendre à la rue palestinienne que lorsque le
calme règne, sa situation s’améliore. Nous faisons
tous les efforts nécessaires afin de débarrasser la
région du terrorisme, mais nous espérons que la
population palestinienne arrivera, par elle-même, à
se libérer de son leadership terroriste. Il faut que
notre contrepartie comprenne que nous n’acceptons
pas que la sécurité de citoyens israéliens soit mise en
danger et ce quel que soit leur lieu de résidence, à
Tel-Aviv ou à Hébron. Depuis trois ans, l’État d’Israël
passe par ce qui est probablement son combat le
plus difficile dans l’engagement armé contre la terreur.
Il s’agit d’un autre chapitre de la lutte du
peuple juif pour son droit national historique et fondamental
d’exister en paix et dans la sécurité dans
son pays - sur les terres d’Israël. Les Forces terrestres
jouent un rôle majeur dans la guerre contre le
terrorisme. Ses hommes et ses commandants agissent
avec détermination et se battent inlassablement,
allant de réussite en réussite. La puissance des
Forces terrestres doit donc être continuellement
consolidée. En effet, il a été démontré, jour après
jour et heure après heure, que les victoires des
batailles de cette campagne sont déterminées par
l’action au contact direct avec l’ennemi.
Que pensez-vous de la barrière de séparation?
Sur le plan sécuritaire, il s’agit sans aucun doute
d’une excellente précaution. Cela dit, je crains que
les habitants juifs qui vivent en toute légalité de
«l’autre côté» de la barrière ne soient considérés
comme «abandonnés» par les palestiniens et que ces
derniers ne s’attaquent à eux de façon très grave. La
barrière - oui, mais à condition qu’elle soit accompagnée
de mesures de protections bien étudiées et
efficaces pour tous nos citoyens, où qu’ils vivent en
Israël.
Que pensez-vous de la fameuse «houdnah», cette
trêve qui, en fait, a permis aux Arabes de fourbir
leurs armes?
La manière dont la «houdnah» est perçue par l’Olp
est l’antithèse de la lutte contre le terrorisme. Il
n’existe qu’un seul moyen pour combattre ce fléau, c’est que les palestiniens utilisent ce temps mort
pour lutter à fond contre les organismes terroristes
arabes qui agissent dans les zones qu’ils contrôlent.
Or, non seulement ils n’ont pas lutté contre eux
mais en réalité, nous avons quotidiennement vu des
membres du Hamas et du Fatah se promener librement
et se réorganiser, en particulier sur le plan
de l’armement, et ce en toute impunité. L’armée a
entrepris un certain nombre d’actions préventives
car sans celles-ci, il était impossible d’assurer la
sécurité de nos citoyens. Nous avons également
exigé avec la plus grande fermeté que le leadership
palestinien intervienne pour mettre un terme aux
activités des groupements terroristes, or il n’a rien
fait. La «houdnah», qu’Israël n’a jamais acceptée
formellement, a donc fonctionné exactement dans
le sens opposé de ce qu’elle était censée produire.
Notre gouvernement, tout comme l’Administration
américaine, sont conscients de cette réalité. Nous ne
pouvons pas tolérer une situation où l’armée doit
faire preuve de retenue en bafouant tous les principes
fondamentaux de la lutte contre le terrorisme.
Sur un plan plus large, il faut savoir dans quel esprit
nous menons notre combat. Au cours des trois dernières
années, l’armée a investi toutes ses forces et
tous ses moyens dans la lutte contre le terrorisme et
pour la défense des citoyens. Nous sommes la seule
armée populaire au monde, la majorité de nos soldats
étant des citoyens et non des conscrits. Or à ce
jour, l’État d’Israël se bat encore et toujours pour
son droit à l’existence et à sa survie. Cela peut sembler
curieux 55 ans après sa fondation, mais telle est
la réalité. Nos soldats, issus du peuple, sont
conscients de ce fait et c’est cette nécessité de survie
qui les motive. Une armée, une société, un pays qui
se bat pour son droit à l’existence ne peut pas mener
sa lutte par le biais d’une armée de recrues ou de
professionnels, la motivation doit venir des «tripes
du peuple». Tel est le cas en Israël où, dès l’âge de
18 ans, tout citoyen est appelé sous les drapeaux et,
une fois son service obligatoire terminé, il fait ses
cours de répétitions chaque année jusqu’à l’âge de
45 ans. C’est de là que nous tirons notre force et
notre détermination, malgré les énormes difficultés
auxquelles nous devons faire face jour après jour.
En quoi cette détermination est-elle directement
liée à la lutte contre le terrorisme arabe?
La décision des Arabes de lancer une campagne
de terrorisme n’avait pas seulement pour but d’obtenir
un certain nombre d’avantages politiques ou
militaires, elle était avant tout destinée à briser le moral des Israéliens. Nous sommes une société qui
aime vivre calmement, proche des valeurs familiales
et qui déteste les difficultés de la vie. En se
basant sur cette réalité, les palestiniens ont fait un
calcul stratégique très simple en se disant: «En utilisant
intensivement l’arme du terrorisme, en infligeant
des souffrances terribles aux familles juives,
nous allons briser les fondements de cette société
qui ne tiendra pas le coup et qui, en définitive, baissera
le drapeau bleu et blanc devant nous et hissera
le fanion blanc. Nous obtiendrons alors gain de
cause sur l’ensemble de nos revendications, en particulier
sur la question du droit du retour, ce qui
nous permettra de reprendre le pays en y installant
plusieurs millions de palestiniens.» Cette stratégie
s’est avérée totalement erronée, c’est exactement
le contraire qui s’est passé. Au cours des trois dernières
années, la population israélienne a fait
preuve d’une capacité de résistance incroyable et
unique au monde, faisant face à la souffrance
avec dignité et détermination. Les Arabes ont
aussi bien échoué dans leur stratégie offensive en
utilisant l’arme de la terreur que dans leur désir de
briser les fondements mêmes de la société israélienne.
Ils ont réussi à ébranler sérieusement notre
économie et c’est la raison pour laquelle notre
gouvernement actuel a fait de la relance économique
l’une de ses priorités. Il est vrai que le nouveau
plan implique des coupures sévères dans le
budget de l’armée, mais nous continuerons à
mener notre lutte contre le terrorisme, car il est
évident que le calme constitue un élément majeur
pour que la relance économique soit couronnée de
succès.
Vous nous avez dit que l’un des buts du terrorisme
arabe était d’infliger un maximum de dommages et
de douleurs aux familles juives. Ne pensez-vous pas
qu’il serait temps de procéder de manière plus radicale
contre les palestiniens?
Nous sommes l’armée qui a les plus hauts standards
de moralité au monde. Toute prise de butin et toute
humiliation des individus sont très sévèrement réprimées
chez nous. Il y a bien évidemment de temps en
temps des excès, mais ils sont toujours punis de
manière exemplaire. Lorsque j’étais à Beyrouth,
après avoir chassé l’Olp, je me souviens d’avoir
rencontré des dizaines de très jeunes filles mères
qui avaient été violées par des palestiniens. Je ne
parlerai même pas des vols qu’ils avaient commis
dans les appartements. De tels agissements sont
inimaginables chez nous. D’ailleurs, je rappelle à
chaque soldat qui entre à l’armée les trois principes
de base qui guident notre action: «la victoire,
l’amour du pays et le respect de l’individu, qu’il soit
notre soldat (soumis à nos ordres) ou notre ennemi
». Ceci n’est pas toujours facile, surtout lorsque
l’on est face à un prisonnier terroriste. Mais nous
exigeons que nos soldats et surtout nos commandants
aient une conduite exemplaire. Sans vouloir
entrer dans les détails, je peux vous dire que la qualité
particulière des relations humaines au sein de
notre armée se reflète plus précisément aujourd’hui
dans la situation économique difficile dans laquelle
nous nous trouvons. Dans certains cas, l’armée doit
pourvoir à des aides financières de base pour des
soldats et il n’est pas rare que certains commandants
apportent une aide directe, de leur poche, à l’un ou
l’autre de leurs soldats démunis. Dans la population,
faire son service militaire n’est pas considéré comme
un travail ou une obligation, mais comme une forme
de mission dont l’esprit est résumé dans cette maxime
du prophète Zacharie (IV-6) qui dit: «Ni par la
puissance, ni par la force, mais bien par mon esprit...».
Vous nous parlez du «respect de l’individu». Mais
que ressentez-vous lorsque vous lancez des troupes
à l’assaut de villages juifs en Judée-Samarie-Gaza
pour expulser des familles? En d’autres termes,
êtes-vous vraiment content d’engager des soldats
juifs contre des citoyens juifs?
Tout d’abord, je voudrais rappeler que nous sommes
une armée de défense et que nous vivons dans un État
de droit politique et non dans une dictature militaire.
L’armée constitue donc un bras exécutif des décisions
prises par le pouvoir en place. De plus, je tiens à souligner
que tout citoyen israélien, où qu’il vive, a droit à
notre protection totale, qu’il habite à Tel-Aviv ou en
Judée-Samarie-Gaza. Toutefois, si quelqu’un commet
un acte qui contrevient aux lois du pays, comme par
exemple de s’installer sur une propriété qui ne lui appartient
pas, les forces de l’ordre doivent faire leur devoir.
Je ne pense pas que l’armée soit l’outil ou l’organisation
qui devrait s’occuper de ce genre de choses,
mais si nous recevons l’ordre de le faire, nous l’exécutons.
Comment voyez-vous l’avenir?
Notre moralité et nos esprits sont certes élevés,
mais nous disposons aussi d’une troupe formidable,
de services de renseignements hors pair et d’une
technologie révolutionnaire mise au point et fabriquée
par les industries militaires israéliennes, dont
une partie a fait ses preuves au cours des trois dernières
années et une autre est sur le point d’être
mise à l’épreuve du feu sur le terrain. D’ailleurs,
nous venons de lancer le meilleur tank du monde,
le Merkavah IV, que nous produisons au rythme de
50 unités par an. En fait, je suis assez optimiste car,
malgré toutes les difficultés, nous disposerons dans
les années à venir d’une armée éventuellement plus
réduite, mais plus efficace et plus professionnelle.
La nouvelle situation stratégique au Moyen-Orient
due à la présence américaine en Irak nous permet
de nous lancer dans une réévaluation des risques
calculés que nous pouvons raisonnablement prendre.
Sur le plan de la protection et de la défense, il
en résulte que nous serons à même d’apporter une
réponse solide plus pointue aux problèmes de sécurité
de l’État d’Israël, notre priorité étant de garantir
la sûreté des citoyens d’Israël face au terrorisme
arabe.
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