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Sommaire Pologne Printemps 2003 - Pessah 5763

Éditorial – Avril 2003
    • Éditorial

Pessah 5763
    • Identité et existence

Politique
    • Et après ? [pdf]

Interview
    • Un défi de taille

Recherche scientifique
    • Excellence et tradition
    • Le secret du ribosome

Judée - Samarie - Gaza
    • Migron [pdf]

Shalom Tsedaka
    • Rien ne vaut une vie ! [pdf]

Analye
    • Divorce politique [pdf]

Analyse
    • Impuissance ou indifférence ?

Œnologie
    • Le'hayim !

Reportage
    • Volonté - Endurance - Succès [pdf]

Pologne
    • Une tentative de réparation
    • Mémoire et espoir [pdf]

Union Serbie - Monténégro
    • Jérusalem et beograd
    • Savez jevrejskih opstina jugoslavije
    • Quatre enterrements... et un mariage !
    • Hier - aujourd'hui - demain ? [pdf]
    • Quo vadis serbia ? [pdf]
    • Jevrejski istorijski muzej
    • La Shoa en Serbie

Yougoslavie
    • Josip Erlih [pdf]

Éthique et Judaïsme
    • Responsabilité filiale

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Une tentative de réparation

Par Roland S. Süssmann
Itzhak Shamir, l'ancien Premier ministre de l'État d'Israël, répétait à qui voulait l'entendre que "les Polonais boivent l'antisémitisme avec le lait de leurs mères". Cette réalité illustre bien la complexité des relations entre Juifs et Polonais qui, au niveau national, individuel, historique et émotionnel sont aussi profondes qu'inextricables. A Varsovie, j'ai été frappé par l'importance des investissements israéliens dans les domaines de l'immobilier et du commerce. Afin de nous parler des relations entre Israël et la Pologne, nous nous sommes brièvement entretenus avec S.E. le professeur SHEVACH WEISS, ambassadeur d'Israël en Pologne, lui-même d'origine polonaise, survivant de la Shoa et ancien président de la Knesset.

Pouvez-vous en quelques mots nous parler de l'état actuel des rapports entre Israël et la Pologne ?

En général, lorsque l'on pose ce genre de question à un diplomate, il répond toujours qu'entre les deux pays, tout va pour le mieux. En ce qui concerne la Pologne, non seulement c'est effectivement le cas, mais nos relations s'améliorent de jour en jour et sont bien meilleures que celles que nous entretenons avec la plupart des pays européens. Le président Aleksander Kwasniewski met personnellement tout en œuvre afin de donner un essor particulier aux échanges entre les deux pays et ce à tous les niveaux, formels et informels, publics et secrets. Je pense que la nouvelle démocratie polonaise qui a vu le jour il y a une dizaine d'années souhaite dans un certain sens rattraper et compenser le temps perdu au cours duquel, sous le régime communiste qui a duré deux générations, les deux pays étaient pour ainsi dire totalement isolés l'un de l'autre. Sur le plan politique, je pourrais comparer l'attitude de la classe politique, du gouvernement, du président et de l'élite à l'égard d'Israël à celle de Yoschka Fischer, le ministre allemand des Affaires étrangères, connu pour ses bonnes dispositions à notre égard. Il faut bien comprendre que les relations se déroulent sur deux niveaux totalement différents et séparés, à savoir: les relations intergouvernementales et les rapports de nation à nation.

Pensez-vous que cette position somme toute assez positive soit motivée par un sentiment de culpabilité des Polonais qui ont permis que toute leur communauté juive, soit trois millions d'âmes, soit annihilée et massacrée sur leur territoire ?

Il s'agit d'un mélange d'éléments qui se composent de ce qui s'est passé pendant la Shoa et après, d'une certaine forme de rejet de l'antisémitisme traditionnel, de la reconnaissance de la culpabilité des assassins polonais et d'un certain type de "bon ton politique" inhérent à toute démocratie. Cette attitude est motivée par le désir d'être accepté en tant que membre à part entière dans la Communauté européenne. En fait, nous sommes là en présence d'une combinaison assez complexe mais qui porte ses fruits. Il faut bien comprendre que d'une certaine manière, la Pologne n'a jamais vraiment collaboré avec les nazis, je dirai même que la population, la nation et le pays ont été victimes du nazisme et de la Russie. (n.d.l.r. Les Allemands, considérant les Polonais comme des sous-hommes incapables, ne les ont pas autorisés à massacrer eux-mêmes directement les Juifs. Il y a néanmoins eu quelques massacres de Juifs perpétrés par les Polonais pendant la guerre.) Ceci ne me fait pas oublier, bien entendu, les massacres de Juifs qui ont eu lieu en Pologne même après la Shoa, ni les déclarations ouvertement antisémites de Gomulka. Mais aujourd'hui, il faut bien comprendre que la Pologne actuelle veut être acceptée en tant que membre à part entière de l'Europe et que ceci provoque évidemment un changement d'attitude extrêmement positif à l'égard d'Israël ainsi qu'envers le peuple juif en tant que tel.

Tout indique qu'il s'agit d'une démarche surtout politique dont les buts sont bien définis. En ce qui concerne les relations entre les nations juive et polonaise, comment vivez-vous l'évolution de la situation ?

La majorité des Juifs polonais et des survivants de la Shoa n'oublieront jamais l'atmosphère antisémite triste et tragique qui a prévalu en Pologne avant, pendant et après la Deuxième Guerre mondiale. Malgré tous les changements dramatiques et positifs dont je vous ai parlé, je pense que le rétablissement de relations normales entre les deux nations constitue un processus très long, difficile et ardu.

Pensez-vous que la difficulté de restaurer ces relations réside dans le niveau élevé de collaboration de la population polonaise avec les Allemands dans le massacre des Juifs ?

Celle-ci n'était pas pire que dans d'autres pays où certains gouvernements étaient directement collaborationnistes, je pense à Vichy et à Rome, sans parler du fait que les populations des pays Baltes et de nombreuses autres régions d'Europe massacraient elles-mêmes directement leurs Juifs, en étroite collaboration avec les Allemands. A Yad Vashem, il existe une liste de gens ayant activement sauvé des Juifs, les "Justes du monde", qui compte dix-huit mille noms dont 35%, soit plus de six mille, sont Polonais. Lorsque l'on regarde l'image globale de ce qui s'est passé en Pologne au niveau de la population pendant la guerre, nous constatons que d'une part il y a eu des situations terribles, dramatiques et meurtrières mais que d'autre part, il y a eu aussi un nombre important de personnes courageuses.

Pour en revenir à la question politique, la Pologne va prochainement faire son entrée dans la Communauté européenne qui, dans l'ensemble, a une politique ouvertement anti-israélienne. Pensez-vous qu'elle s'alignera à cette politique ou qu'elle fera cavalier seul ?

Nous espérons que la Pologne pourra continuer à entretenir et à développer la relation unique, et j'insiste sur ce terme, qu'elle cultive et entretient avec Israël et le peuple juif. Nous sommes sur le point de construire un avenir prometteur et plus positif ensemble et nous tentons de panser les blessures du passé, bien entendu sans rien oublier. A ce stade et en fonction des différents dialogues que j'ai eus avec des responsables polonais, j'ai des bonnes raisons de penser que nous disposons de suffisamment d'éléments solides qui nous permettent de croire que la Pologne ne changera pas son fusil d'épaule. Le président Kwasnieski s'est rendu à deux reprises en Israël, plusieurs ministres sont venus à Jérusalem, et d'autres visites de ce type sont prévues pour l'année 2003. Plusieurs déplacements d'officiels israéliens ont eu lieu au cours de la dernière décennie, ce à tous les niveaux, qui se sont déroulés dans des conditions remarquables. La prochaine "Marche des Vivants" sera d'ailleurs dirigée par les présidents Katsav et Kwasnieski.

Qu'en est-il de l'influence arabe dans la politique polonaise à l'égard d'Israël ?

Elle est effectivement bien présente, car la Pologne entretient une relation privilégiée avec les pays arabes datant de l'époque du régime communiste qui, à ce jour, n'a pas été modifiée. De plus, je ne pense pas que les Arabes aient suffisamment d'ascendant pour être à même d'entraver l'évolution positive des rapports entre Israël et la Pologne.

Pouvez-vous nous faire une brève description de la communauté juive ?

Avant la Shoa, il y avait trois millions et demi de Juifs en Pologne. Aujourd'hui, il en reste environ dix mille, dont trois à quatre mille sont affiliés à la vie communautaire. Il y a douze petites communautés à travers le pays, la population est avant tout vieillissante et une très grande activité sociale y est déployée. Environ la moitié des biens immobiliers juifs ont été restitués aux institutions communautaires.

Vous êtes personnellement un survivant polonais de la Shoa. Que ressentez-vous lorsque vous êtes en Pologne ?

Je dois vous dire que ce n'est pas du tout facile pour moi, loin de là. Toutefois, j'estime qu'il ne s'agit pas d'une position diplomatique classique. Après avoir eu une carrière importante en Israël en tant que président de la Knesset, on ne peut pas dire que le fait d'être nommé ambassadeur en Pologne constitue véritablement une promotion, Varsovie n'étant ni Washington ni Moscou ni Paris ou Londres. Toutefois, je pense qu'en ma qualité de Juif né en Pologne et survivant de la Shoa, je ne me limite pas simplement à accomplir ma tâche quotidienne de diplomate, mais j'ai une mission historique à remplir. En bref, j'estime avoir un rôle personnel à jouer dans l'établissement de cette nouvelle atmosphère positive et constructive qui est sur le point de se matérialiser entre nos deux pays.

S.E.M. le professeur Shevach Weiss nous a expliqué combien les rapports entre les deux pays sont excellents, mais une recherche un peu plus approfondie nous a appris qu'en fait la Pologne, comme les autres pays de l'ancien bloc soviétique, n'entretient de bonnes relations avec Israël et les organisations juives à travers le monde que dans un seul but: gagner les faveurs des États-Unis, surtout financières, par le biais d'une soi-disant influence juive.

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