Éditorial - Avril 1997
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A qui a profité le génocide allemand ?
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La politique de génocide perpétrée par le IIIe Reich allemand à l'encontre des Juifs d'Europe ne fut pas seulement le crime le plus odieux du XXe siècle, ce fut également une très grosse affaire: pour les assassins, pour certaines des nations qui assistèrent en spectateurs et enfin pour les vainqueurs. A plusieurs occasions, ces derniers donnèrent la priorité à leurs objectifs géopolitiques et à leur cupidité, au détriment des besoins désespérés des survivants de la Shoa et des revendications légitimes des héritiers de millions de victimes de l'Allemagne nazie. Le débat actuel a été soulevé par l'affaire des comptes dans les banques suisses ayant appartenu aux victimes de la Shoa. L'année dernière, le sénateur américain Alfonse D'Amato (Rép.- NY), président de la Commission des banques du Sénat, et le Congrès juif mondial ont été les premiers à interroger les banques suisses au sujet de ces comptes. Le Centre Wiesenthal a mené une enquête indépendante et pris l'initiative sur plusieurs fronts: recours collectifs en justice au nom des survivants de la Shoa et prises de contact avec les dirigeants politiques sur trois continents afin d'obtenir des résultats pratiques ainsi que toute la vérité.
Mise au jour de la filière suisse-nazie
Le sénateur D'Amato a rendu public un document du Département d'État datant de 1946 et qui prouvait que des officiers nazis de haut rang - dont Hermann Goering et Josef Goebbels - avaient utilisé des valises diplomatiques suisses pour faire passer l'argent volé vers l'Argentine. Cette révélation ne fait que renforcer les demandes formulées par la communauté internationale afin que la Suisse s'engage de façon absolue et honnête à mettre fin aux mensonges de ces dernières décennies et à la politique de dissimulation pratiquée par de nombreux responsables du monde bancaire helvétique. Selon le document, "des fortunes en valeurs, en lingots d'or et en espèces ont été transférées dans la capitale argentine" par de hauts officiers nazis, tel le maréchal du Reich, H. Goering, qui s'était servi de valises diplomatiques pour expédier plus de 20 millions de dollars de "sa fortune personnelle en Argentine via la Dresdener Bank de Berlin et la Société de Banque Suisse de Genève".
Rétablir les faits historiques
Un nouveau rapport publié en septembre dernier par le Foreign office britannique, sous la direction du secrétaire aux Affaires étrangères Malcolm Rifkind, conclut que les banques suisses ont gardé plus de 85% de l'or déposé par les nazis. Les 23 pages du rapport décrivent également les négociations souvent acrimonieuses entre les Alliés et la Suisse portant sur la divulgation et la restitution de ces biens après la Seconde Guerre mondiale. A l'automne dernier, un historien suisse a dévoilé des documents prouvant que des comptes non réclamés appartenant à des victimes de la Shoa furent utilisés par la Suisse après la guerre afin de résoudre des litiges concernant les compensations avec la Pologne et la Hongrie, au cours d'accords secrets. Un autre document secret de l'Armée américaine confirme qu'à la fin de la guerre, des soldats alliés découvrirent des sacs pleins de plombages en or provenant de dents humaines, dans une cache nazie en Allemagne de l'Ouest. Tous ces faits, ainsi que d'autres horribles récits révélant la cupidité et les tentatives de dissimulation, ont bien entendu alimenté le débat public. Ce qui suit constitue un bref aperçu historique du scandale qui prend des proportions croissantes.
La Suisse, banquier de choix des nazis
En 1939, l'Allemagne possédait quelque 180 millions de dollars en or. Une fois en guerre, les réserves d'or s'épuisèrent rapidement, les prêts ne purent être remboursés à temps et les crédits furent fermés. Les nazis se mirent aussitôt à piller les trésors d'État des pays occupés ainsi que les biens de millions d'individus, principalement des Juifs. L'Allemagne utilisa cet or pour acheter des matières premières et des devises étrangères, vitales pour son économie. La voie principale passait par la Suisse, mais d'autres pays neutres d'Europe acceptèrent également les dépôts d'or des Allemands. Pour cacher la provenance de leur butin, les nazis expédièrent presque tout l'or volé en Allemagne, où ils le soumirent à la refonte. Les enquêtes indépendantes effectuées par le Centre Wiesenthal ont mis au jour des ordres établis en 1942 qui enjoignaient le Bureau de payement des SS de remettre tous les objets de valeur recueillis dans les camps de concentration (or des dents, anneaux nuptiaux et autres bijoux) à la Reichsbank à Berlin. En retour, d'après les documents présentés lors du procès de Nuremberg, la Reichsbank crédita les SS en DM afin de financer leur machine de guerre et fit fondre l'or pour son propre compte. Pas moins de 76 trains chargés des biens personnels des victimes des nazis - biens estimés à 500 millions de dollars - arrivèrent à Berlin durant la guerre. Pendant tout ce temps, la Grande-Bretagne et les États-Unis savaient pertinemment que la Suisse acceptait des dépôts d'or volé. Déjà avant la guerre, les Alliés suivaient de près les déplacements de l'or nazi. Dans une déclaration publiée le 5 janvier 1943, les Alliés se réservaient le droit "de déclarer nul et non avenu tout transfert de... ou commerce de biens... quels qu'ils soient, qui sont ou ont été situés dans les territoires... sous occupation". Sans se laisser démonter, la Suisse continua à accepter les expéditions allemandes d'or au cours de l'année 1943 et ce n'est qu'à la fin de 1944 qu'elle annonça que tous les capitaux hongrois, slovaques et croates déposés dans ses banques étaient désormais gelés. En février 1945, elle bloqua les comptes allemands et en mars, elle accepta de dresser un inventaire des dépôts allemands à travers le pays, dans l'intention de restituer ces capitaux à leurs propriétaires légitimes. Entre-temps, accusant la Suisse de détention illégale d'or volé, l'Amérique gela tous les capitaux suisses déposés aux États-Unis et en Allemagne. Confrontés à des documents prouvant l'étendue de leurs avoirs nazis, les négociateurs suisses, craignant le blocage suivi de leurs comptes, acceptèrent de verser 250 000 francs suisses, sur l'or allemand détenu dans leur pays. En acceptant cette somme, représentant à peine 50 millions de dollars, les gouvernements alliés renonçaient à toutes futures revendications vis-à-vis de la Suisse en rapport avec l'or allemand ! Dans cette parodie de justice, les Suisses s'en sortirent en gardant environ 7/8 de tout l'or allemand, puisqu'on estimait qu'ils recelaient dans leurs coffres au moins 400 millions de dollars en or volé par l'Allemagne nazie.
Harcèlement des victimes par les banques suisses
Que les agissements de la Suisse neutre avec son tout puissant voisin durant la guerre soient justifiables ou non, il ne fait aucun doute que son attitude vis-à-vis des survivants après la guerre ne mérite qu'un seul qualificatif: l'avidité. Pendant plusieurs décennies, les banques suisses ont éconduit les familles de victimes de la Shoa qui avaient ouvert des comptes avant la guerre mais n'étaient pas revenues pour réclamer leur dû. Comme condition préliminaire, les banquiers exigèrent des survivants de présenter les certificats de décès de leurs proches assassinés; nul n'ignore que la plupart des victimes gisaient dans des fosses communes sans repères ni signes ou avaient été réduites en cendres dans les crématoires des camps. Cédant à une pression internationale montante, les banques suisses commencent enfin à ouvrir leurs livres et ont accepté de prélever quelque 32 millions de dollars pour régler toutes les revendications des survivants. Même en 1996, ce montant ne représentait probablement même pas une fraction des sommes immenses déposées originellement.
Le Centre exige une action rapide
Dans une lettre adressée à l'Ambassadeur de la Suisse aux États-Unis, les rabbins Marvin Hier et Abraham Cooper ont insisté afin que le gouvernement suisse mette à effet sept points essentiels:
1. Gel de tous les capitaux des comptes dormants ou contestés et mise à disposition de la documentation liée aux rejets des revendications présentées en réponse à la loi suisse de 1962 (loi concernant les biens des personnes persécutées pour des raisons religieuses, raciales ou politiques).
2. Présentation détaillée des demandes d'indemnité rejetées pour n'importe quelle raison par n'importe quelle banque ou par l'Association des banquiers suisses.
3. Divulgation des pays étrangers qui avaient des accords avec les banques suisses ou avec le gouvernement suisse autorisant le payement à des entreprises suisses à partir des comptes où se trouvaient des biens déposés, clandestins ou spoliés et divulgation du montant de tout payement de ce genre.
4. Elargissement des pouvoirs de la Commission Volcker présidée par Paul A. Volcker, ancien président de la Banque fédérale de réserve américaine, de sorte qu'ils incluent tous les comptes de biens déposés, clandestins ou spoliés et que soit assurée l'entière coopération de toutes les agences gouvernementales suisses et des institutions bancaires privées, dans le but de fournir un compte rendu complet des trois types de biens.
5. Nomination d'un historien ou d'un groupe d'historiens et d'une équipe d'assistants afin de rendre compte de tous les documents d'archives gouvernementaux et des registres des institutions financières et de leurs échanges avec l'Allemagne entre les années 1933 et 1945.
6. Reconnaissance de la juridiction des tribunaux américains pour l'ultime examen légal de la responsabilité des banques suisses par rapport aux allégations de collaboration avec l'Allemagne pendant la période 1933-1945.
7. Etablissement d'une Commission chargée d'établir la vérité qui accorderait pendant un an une totale immunité civile et pénale à toute personne se présentant pour discuter ouvertement et en toute franchise des rapports financiers de la Suisse avec l'Allemagne de 1933 à 1945.
Tous les chemins ne menaient pas à la Suisse
A la fin de la guerre, l'Allemagne avait amassé quelque 800 millions de dollars en or volé (environ 6 milliards d'aujourd'hui). Des quantités énormes d'or et d'autres objets de valeur furent découverts en Allemagne par les troupes américaines. La cache la plus importante se trouvait dans le complexe minier Merkers, près de Eisenbach; elle recelait des lingots volés en France et en Belgique, des millions de dollars en devises étrangères de toutes sortes, 7'100 sacs de pièces de monnaie en or, des dizaines de milliers de couronnes dentaires en argent et en or, des anneaux nuptiaux, des coupes de Kiddoush et des plats de Séder - le tout évalué à 238 millions de dollars, mais constituant seulement 20% de l'or détenu en Allemagne, selon les estimations. Les objets trouvés à Merkers et dans d'autres lieux furent rassemblés à Francfort et expédiés ensuite à Londres et New York, dans l'attente d'une redistribution par la future Commission Tripartite de l'or.
La Commission Tripartite récompense les bourreaux avant les victimes
La Commission tripartite de l'or (TGC pour Tripartite Gold Commission) fut créée en 1946 pour la redistribution de l'or volé par les nazis. Elle était constituée de représentants français, anglais et américains qui décidèrent que seraient pris en considération uniquement des pays et non des victimes individuelles. Par ailleurs, la Commission trouva des raisons pour exclure les pays du Bloc de l'Est. En juin 1947, la TGC envoya un questionnaire à tous les pays de l'Agence de réparations interalliée, priant chaque pays d'établir des déclarations concernant le détournement illégal de l'or pendant la guerre. Les quantités d'or disparues pendant la guerre étaient de loin supérieures à ce dont on disposait pour la restitution. Les 50 millions de dollars versés par la Suisse et les 280 millions de dollars en or trouvés en Allemagne constituaient ensemble 330 millions de dollars. Excluant les nombreux pays du Bloc de l'Est qui avaient pourtant été totalement dévastés par les nazis, la Commission accorda près de 34 millions de dollars à l'Autriche qui, en 1938, avait fait bon accueil à l'Anschluss et combattu aux côtés des nazis ! L'Italie, qui avait également fait alliance avec l'Allemagne nazie, reçut 6 millions de dollars. Les Alliés prélevèrent 25 millions pour subvenir aux besoins des camps de Personnes Déplacées établis après la guerre. Quant aux familles des victimes et aux survivants, ils furent les grands oubliés de l'affaire. Des documents auparavant confidentiels ont été rendus publics par le Département d'État américain: ils révèlent qu'à peu près deux tonnes de l'or de la TGC se trouvent toujours à la Banque de réserve fédérale à New York (28 millions de dollars) et que la Banque d'Angleterre en détient le double.
Le rabbin Hier, à Clinton, Major et Chirac: "Il est temps d'établir toute la vérité !"
Dans des lettres adressées au président des États-Unis, Bill Clinton, au président de la République française, Jacques Chirac, et au premier ministre de Grande-Bretagne, John Major, le rabbin Marvin Hier presse les dirigeants des nations qui formaient la TGC de rendre public les dossiers de la Commission demeurés confidentiels. "Il est remarquable qu'après 50 ans, les dossiers de la Commission soient encore confidentiels et non disponibles pour un examen public", écrit le rabbin Hier. "Il semble ridicule d'espérer découvrir toutes les réponses à cette tragique énigme en Suisse alors que les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France détiennent une information cruciale dans cette affaire." "Selon quels critères fut-il décidé d'accorder 34 millions de dollars prélevés sur l'or nazi à l'Autriche, collaboratrice volontaire du IIIe Reich, alors que seulement 25 millions furent consacrés à l'assistance aux millions de personnes déplacées ? L'argument des Autrichiens selon lequel l'or fut enlevé de leur banque centrale et emporté par les nazis à Berlin au début de la guerre aurait dû être déclaré nul et non avenu en raison de l'adhésion totale de l'Autriche à la politique de Hitler." "De plus, que savait exactement la Commission au sujet de l'or suisse ou de tout autre or ayant appartenu aux victimes de la Shoa ? Tant que ces dossiers demeurent secrets, on risque de ne jamais parvenir à la vérité entière."
Initiatives internationales du Centre Wiesenthal
Comme nous l'avons dit au début de ce rapport, la filière du butin nazi mène aux quatre coins du monde, notamment en Argentine. Le directeur européen du Centre Wiesenthal, Shimon Samuels, et son représentant sud-américain, Sergio Widder, ont rencontré des fonctionnaires de la Banque centrale à Buenos Aires dans le cadre des recherches de documents liés aux transferts d'or effectués par les agents nazis vers l'Argentine. Comme première mesure, le vice-président de la Banque, Martin Lagos, a remis aux représentants du Centre cinq volumes comportant le détail des versements effectués entre 1939 et 1949 par des banques de Suisse, du Portugal et de l'Espagne. On sait que les nazis ont établi des compagnies fictives dans ces pays dans le but de faire passer des fond vers l'Argentine et vers d'autres pays. En France également, le Centre a pu avoir accès aux archives du ministère des Finances concernant la TGC, qui montrent que la Commission redistribua 337 tonnes d'or. "La distribution se poursuit de nos jours, en témoigne le payement de 1,5 tonne d'or à l'Albanie, effectué le 29 octobre", révèle Shimon Samuels. "Ce qui laisse au moins 5,5 tonnes à distribuer avant la dissolution de la Commission début 1997."
Trésors pillés
Selon Greville Janner, membre du Parlement britannique, des objets d'art pillés par les nazis et estimés à environ 23 milliards de dollars (en valeur de 1996) furent expédiés en Suisse et pratiquement aucun de ces objets n'a été restitué aux propriétaires légitimes. D'autre part, il existe en France une collection comptant plusieurs milliers d'ýuvres d'art volées par les nazis et non réclamées qui a été placée en 1949 sous la garde des Musées de France, pour une période de 50 ans. Shimon Samuels a insisté auprès de la direction afin qu'elle mette un terme à cette garde. Par ailleurs, une vente aux enchères en faveur des survivants de la Shoa s'est tenue récemment à Vienne: c'était une victoire couronnant les efforts obstinés d'un seul homme, Simon Wiesenthal, pour obliger l'Autriche de l'après-guerre à reconnaître sa responsabilité. De 1955 à 1969, en violation du Traité national autrichien, Vienne ne fit rien pour rendre à qui de droit les chefs d'ýuvres volés trouvés par l'armée de libération américaine à Alt Aussee, près de Salzburg. Ce n'est qu'en 1969, après une vigoureuse campagne menée par Simon Wiesenthal, que les autorités prirent la peine de publier une liste des trésors artistiques détenus par l'Autriche. Mais ils la firent paraître dans un obscur journal impossible à obtenir en dehors de ses frontières. La date limite pour les demandes de restitution fut fixée à 1970 (!), après quoi toutes les ýuvres non réclamées reviendraient à Vienne. Dernière honteuse manýuvre de l'Autriche pour éviter toute restitution aux survivants juifs de la Shoa: elle annonça que les objets seraient mis aux enchères et les recettes versées à un fond charitable, dont le bénéficiaire serait désigné plus tard. L'année dernière, sous la pression internationale, le gouvernement a enfin confié la garde des ýuvres d'art volées à la communauté juive autrichienne.
L'héritage de Vichy: questions en suspens
En dehors de l'or volé et du pillage des objets d'art, des questions troublantes demeurent quant au sort des propriétés immobilières et des entreprises ayant appartenu aux Juifs, en France, en Hongrie et en Roumanie. En France, les dossiers gouvernementaux révèlent que des milliers de maisons furent vendues sous la contrainte à 10% de leur valeur. "De grosses fortunes furent bâties sur les propriétés juives volées", explique Shimon Samuels. "A Drancy, halte sur le chemin d'Auschwitz, 20 millions de francs furent confisqués: 8 millions furent acheminés vers l'Allemagne et 12 millions parvinrent dans les caisses de la Banque nationale de France." Dans les années 50, l'Allemagne versa enfin 499 millions de DM à la France comme réparations aux survivants juifs. Mais le gouvernement français se servit de ces fonds et les fit diviser entre groupes de survivants juifs et groupes non juifs. "Appartements, titres de propriétés, sociétés et fonds furent assignés à des agents pour liquidation contre de généreuses commissions", déclare Samuels après le passage en revue des archives du ministère. "Des 75 000 Juifs déportés, seuls 2500 revinrent et rien que dans la ville de Paris, 27 000 propriétés n'ont jamais été réclamées." Le Centre Wiesenthal s'est adressé au maire de Paris, Jean Tiberi, afin qu'il ordonne l'ouverture d'une enquête indépendante: il s'agit de tirer au clair des allégations selon lesquelles des propriétés détenues par la ville auraient été prises aux Juifs qui ne revinrent pas de déportation. Samuels déplore "le champ limité accordé par la municipalité de Paris à l'enquête portant sur les propriétés acquises grâce aux lois raciales de Vichy", justifiant ainsi sa demande d'une investigation indépendante. Ces allégations ont eu du reste un retentissement dans le livre de Brigitte Vital-Durand, "Propriété privée": on y apprend que la municipalité de Paris possède dans le quartier médiéval du Marais 150 immeubles, dont certains ont appartenu à des Juifs, et que plusieurs propriétés ont été vendues sans que leur histoire ne soit divulguée. Comme on sait, une partie du Marais a longtemps abrité le quartier juif de Paris. De son côté, le parlement hongrois a approuvé la création d'une fondation constituée des biens saisis par les Allemands et leurs collaborateurs hongrois et dont l'argent sera redistribué aux survivants de la Shoa. Le plan couvre également des capitaux de Juifs hongrois qui peuvent avoir été cachés dans les banques suisses. En Roumanie toutefois, cette question est devenue le prétexte plutôt discutable de polémiques entre partis politiques. Au cours des récentes élections, les quotidiens Ziua et Romania Libera - en faveur de l'opposition - ont attaqué l'ambassadeur des États-Unis Alfred Moses, l'accusant de soutenir le parti social-démocrate au pouvoir en échange d'une législation assurant la restitution des biens juifs confisqués par les régimes roumains fascistes et communistes.
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