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Sommaire Hollande Automne 2008 - Tishri 5769

Editorial
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Roch Hachanah 5769
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Politique
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Analyse
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Reportage
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Economie
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Hollande
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Crimes et Justice
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Ethique et Judaïsme
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La Mémoire Courte
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Nederlands-Israëlitisch Kerkgenootschap

Ruben Vis. Photo Bethsabée Süssmann

Par Roland S. Süssmann
La présence massive des Juifs en Hollande a débuté comme elle s’est terminée, de manière tragique. En effet, les premiers Juifs se sont établis aux Pays-Bas après avoir été expulsés d’Espagne et 350 ans plus tard, cette énorme communauté a été décimée par la Shoa. L’histoire des Juifs de Hollande est dans un certain sens atypique puisque dès le XVIIe siècle, ils ont été intégrés dans le monde économique et social, ce qui n’était pas le cas dans le reste de l’Europe.
L’église protestante, qui était la religion d’état officielle, était furieuse que les Juifs jouissent de telles libertés, estimant que la seule religion pouvant être ouvertement pratiquée était le protestantisme. Toutefois, les autorités civiles étaient très peu enclines à «punir» les Juifs qui étaient devenus des hommes d’affaires de toute première importance. Afin de mettre un terme à cette controverse d’ordre religieux, en 1619, les autorités ont établi des nouvelles règles concernant les libertés religieuses. Celles-ci donnaient aux responsables des municipalités toute autorité concernant les Juifs. Ainsi, Amsterdam a déclaré que les Juifs étaient les bienvenus, pas en tant que citoyens, donc restreints dans l’exercice de leurs droits politiques, mais comme homme d’affaires libres (avec certaines limitations). Quelques villes ont suivi l’exemple d’Amsterdam, d’autres ont accordé les pleins droits aux Juifs. Le résultat immédiat de cette évolution a fait que les Juifs ont pu s’occuper de leurs propres affaires comme bon leur semblait. Les affaires internes étaient dirigées par la Kehilah (qui avait le statut d’un genre d’autorité semi-autonome), dont le leadership était élu par les membres de la communauté, les questions juridiques étaient réglées dans le cadre du Beth Din (tribunal religieux) et celles relatives à l’éducation étaient organisées dans le cadre communautaire.
Actuellement, il ne reste donc qu’une modeste fraction de ce qu’a été cette magnifique communauté qui, en 1940, comptait 140'000 Juifs dont environ 34'000 réfugiés qui avaient fui l’Allemagne nazie, l’Autriche, la Bohème et la Moravie et trouvé porte ouverte aux Pays-Bas. Le 2 octobre 1942, 12'296 Juifs ont été déportés vers les camps de la mort et le processus a été progressivement accéléré. En 1946, il ne restait plus qu’environ 30'000 Juifs en Hollande, soit près de 20% de la population qui y vivait avant la guerre.
La vie juive d’aujourd’hui en Hollande est la conséquence directe du massacre de la population juive. Bien qu’il y ait des communautés dans les douze provinces, l’on peut dire que la majorité des Juifs hollandais vit à Amsterdam et dans sa périphérie. Sur le plan structurel, la communauté juive est divisée en deux organisations: la NIK (Nederlands-Israëlitisch Kerkgenootschap), organisation faîtière qui regroupe toutes les communautés juives, et la CJO (Centraal Joods Overleg), sorte de comité de coordination juif qui englobe toutes les organisations juives, y compris les organismes de bienfaisance. C’est aussi l’organe qui représente la population juive face au gouvernement, qui mène la lutte contre l’antisémitisme, qui s’occupe de la défense d’Israël, etc. Cette organisation est représentative pour tous les aspects de la défense de la cause juive, sauf pour les questions religieuses telles l’abattage rituel, la gestion des cimetières, etc.
C’est au centre communautaire d’Amsterdam, situé dans un quartier résidentiel verdoyant au milieu de villas magnifiquement aménagées où vit une bonne partie de la société juive, que nous avons rencontré RUBEN VIS, qui porte la double casquette de secrétaire général du NIK et du CJO, afin qu’il nous explique la manière dont la vie juive est structurée en Hollande aujourd’hui.

Pouvez-vous en quelques mots définir les fonctions du NIK ?

Notre activité principale est de venir en aide aux communautés dans toutes les questions touchant à la gestion des finances, des immeubles communautaires, des différentes communautés, etc. Nous les soutenons sur le plan purement technique et religieux. Nous avons d’ailleurs un rabbin au NIK. Chaque communauté a sa propre structure financière, mais nous les assistons lorsqu’il s’agit de choisir un rabbin, d’établir un nouveau monument de la Shoa, etc. Nous aidons aussi les communautés à gérer leurs relations avec les autorités locales, ce qui n’est pas toujours très évident. Nous avons aussi tout un département dont l’activité est de développer et de publier du matériel éducatif juif destiné à des enfants qui ne fréquentent pas une école juive, ce qui est le cas pour tous ceux qui n’habitent pas à Amsterdam et dans sa périphérie, soit environ 300 jeunes. Ces enfants vont dans un Talmud Torah dont les cours ont en général lieu le dimanche. Dans le meilleur des cas, ils ont deux heures de cours par semaine, souvent même seulement deux fois par mois. Pour qu’un tel enseignement puisse se faire, il nous faut des pédagogues et des livres au sens large du terme. Les professeurs qualifiés refusent ce travail puisqu’il s’agit d’une activité qui se limitée à un jour ou même un après-midi par semaine. Certains rabbins acceptent de donner des cours mais dans l’ensemble, nos enseignants ne sont pas compétents. Nous avons donc été obligés de développer du matériel éducatif pouvant servir à des enseignants peu qualifiés et suffisamment attrayant pour que des enfants aient envie de les regarder en dehors des cours dominicaux. Nous avons tellement bien réussi dans ce domaine que nous avons reçu le Prix d’Israël pour l’éducation juive dans la Diaspora. Nous avons des spécialistes qui savent développer ce matériel afin qu’il soit adapté au système pédagogique et au mode de pensée moderne de la Hollande. Ceci est très important car aujourd’hui, lorsque les enfants reçoivent un fascicule éducatif, ils savent exactement quoi, comment et où chercher les informations. Ils savent tout de suite ce que les enseignants attendent d’eux. Tout est calculé et étudié, les illustrations, les pictogrammes, la manière dont les questions sont posées dans les exercices, le choix des coloris, des fontes, etc. Nos publications touchent les sujets les plus variés, de la Parasha de la semaine à l’explication des fêtes juives en passant par la signification de la cacherout et beaucoup d’autres sujets encore. De plus, nous publions des livres religieux en hollandais qui sont traduits par nos soins. Nous avons été amenés à nous charger de ces publications puisque personne d’autre ne le faisait. Nous avons publié des livres de prières, la Mishnah, le Kitzour Shoulkhan Aroukh (concentré de législation et de règles de vie juives), ces ouvrages sont très demandés et se vendent très bien. Nous venons de publier une Meguilah de Pourim pour les enfants, elle se présente sous forme d’un livre dépliable, un peu comme une véritable Meguilah manuscrite qui est pliée lorsqu’on la lit en public. Au recto de chaque page se trouve le texte hébraïque et au verso une explication illustrée et dans un langage à la portée des enfants.
Une autre partie importante de nos activités concerne l’entretien des 250 cimetières disséminés à travers tout le pays, dont certains font 60 m2 et d’autres sont énormes. Nous ne pouvons pas les fermer ou les vendre. Ces cimetières se trouvent pour la plupart dans des régions où il n’y a plus de Juifs. En Hollande, il existe une loi disant qu’il est interdit de fermer le cimetière de quelqu’un d’autre à condition que ces terres soient encore et toujours des cimetières. Pour démontrer qu’ils nous appartiennent et que nous les entretenons, nous avons une personne employée à plein temps qui ne fait que voyager jusque dans les endroits les plus reculés du pays afin d’inspecter ces cimetières. Les municipalités participent à l’entretien dans le sens que l’herbe est tondue quatre fois par an. Nous mettons l’accent sur le fait de bien déterminer la surface de nos cimetières et d’y mettre une clôture afin que personne n’ait subitement l’idée de s’en approprier le sol pour y faire un projet immobilier. Je sais que dans les pays de l’Est et en Allemagne, il y a très souvent des problèmes qui émanent du fait que la propriété du terrain du cimetière n’est pas clairement établie. Ici, tout cimetière clôturé par nous appartient au NIK. De plus, dans le sud du pays, il y a des cimetières qui appartiennent à la communauté juive d’Anvers, car là-bas ils n’ont pas le droit d’avoir des cimetières religieux indépendants.

Comment évaluez-vous l’antisémitisme en Hollande ?

Toute nouvelle régulation qui nous porte préjudice n’est pas générée à cause de nous, mais nous en subissons les conséquences. Nous avons actuellement un grand problème avec la question de la Shehitah (abattage rituel). Nous sommes au centre de l’attention, bien que la manière juive de l’abattage des animaux soit totalement indolore, rapide et réalisée par de grands professionnels qui connaissent très bien leur travail, ce qui n’est pas du tout le cas du Hallal. Il est aujourd’hui grandement question d’introduire une loi qui exige l’étourdissement de l’animal avant l’abattage rituel. Ceci est évidemment inacceptable pour nous, car la population juive qui mange casher (environ 3000 personnes) ne toucherait plus à cette viande. Sur le plan sentimental, la population juive qui ne mange pas casher serait également très offensée, car la dernière fois qu’une telle mesure a été prise contre nous, c’est pendant l’occupation allemande. Je ne parle même pas du fait que ceci mettrait les autorités au même niveau que les Allemands. Nous sommes confrontés là à une situation qui n’est pas typiquement hollandaise, mais qui progressivement touche toute l’Union européenne.
Il y a un nouveau groupe de néonazis hollandais très agressif et très extrémiste, glorifiant Hitler et cultivant la haine du juif. Certes il est encore petit, mais nous ne devrions pas le perdre de vue ou le négliger. C’est l’une des tâches de notre communauté de rendre le public attentif aux dangers qu’il incarne. D’ailleurs, il a été réprimandé à plusieurs reprises par les autorités judiciaires. Toutefois, comme en Hollande il y a la totale liberté de manifestation, n’importe qui peut se promener en habit noir bardé de signes et de décorations nazis. Cela dit, je pense que l’antisémitisme en Hollande est très lié à la question de l’anti-israélisme et nous mettons tout en œuvre pour combattre les deux aspects de la question.


LA CACHEROUT
Les activités du Grand Rabbinat de Hollande sont variées, mais la question de la cacherout constitue probablement la partie la plus importante de son travail. Outre les questions d’abattage et de nourriture casher en général, il existe un aspect dont on parle peu, mais qui est très important. En Hollande, la fabrication de matières premières telles que le cacao, les parfums, les exhausteurs de saveur et les additifs nutritionnels naturels constituent une très grande industrie. Afin de pouvoir être exportés en Israël et vers certaines fabriques de produits casher en Amérique, tous ces produits doivent avoir un certificat de cacherout. C’est le Grand Rabbinat de Hollande qui le délivre et qui dépêche des contrôleurs dans les grandes fabriques, comme par exemple Unilever, pour y surveiller et tester les marchandises. La surveillance de la cacherout du Grand Rabbinat hollandais s’étend également à la production de produits casher fabriqués en Chine.
Un autre volet de l’activité du Grand Rabbinat réside dans la multiplication des divorces religieux. Avant la guerre, lorsqu’Amsterdam comptait près de 80'000 Juifs, il y avait quatre ou cinq divorces par an. Aujourd’hui, avec une population de 20'000 Juifs, il y a environ 25 à 30 divorces religieux par an. Le Grand Rabbinat de Hollande est confronté actuellement à une nouveauté qui n’est pas une «spécialité hollandaise», mais probablement le résultat de l’émancipation des femmes. Un nombre grandissant de femmes refusent le divorce, or, d’après la loi juive, celui-ci ne peut pas lui être imposé de force.
Dans une conversation avec le rabbin EDDY MAARSEN, responsable des différents sujets relatés ici, celui-ci nous a déclaré: «Toutes les questions comme la cacherout ou les divorces peuvent se régler d’une manière relativement tranquille. Notre plus grand souci provient du nombre énorme de mariages mixtes, probablement le plus élevé d’Europe, plus important que dans les pays scandinaves. Nous sommes confrontés à des questions très sérieuses lorsque des personnes ayant contracté ce genre de mariages souhaitent envoyer leurs enfants à l’école juive, devenir membres de la communauté ou obtenir un enterrement juif. Dans ces cas-là, nous devons faire preuve d’autorité et de diplomatie, ce qui n’est pas toujours évident ou compris».


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