Après une rencontre avec la communauté juive de Bruxelles, qui est aussi éclectique que laïque, la visite à Anvers constitue un dépaysement total. Tout d'abord, on a l'impression d'entrer dans le dernier «Stettel» européen de l'histoire. En déambulant dans les ruelles du ghetto des diamantaires situé près de la gare, le visiteur croit entrer dans un foyer juif très chaleureux, où la maîtresse de maison est en train de préparer les «Kneïdlech» pour le bouillon de poulet servi le vendredi soir à la table familiale afin de célébrer l'entrée du Shabbat.
A Anvers, l'atmosphère est celle du judaïsme vécu au quotidien, celui qui est dans les c½urs, qui sent la bonne soupe, le tchoulend, le gefilte fish et la dafina et où les valeurs fondamentales de la famille, de l'étude juive à haut niveau et du respect d'autrui ne sont pas des slogans politiques, mais de simples faits vécus quotidiennement. Dans les vitrines des électriciens juifs, on aperçoit des objets que l'on ne voit pas ailleurs, comme des montres pour régler la lumière le shabbat, des loupiotes pour le deuil, des plaques chauffantes pour maintenir les repas chauds shabbat, etc.
Dès la sortie de la gare donc, on se retrouve dans un monde où orthodoxie juive et diamants sont visiblement intimement liés. En effet, 80% de la population juive anversoise travaillent dans l'industrie de cette magnifique pierre, et 80% des quatre bourses de diamants sont entre des mains juives. Pour bien comprendre l'importance de cette activité, il faut savoir que 65% de la production mondiale du diamant brut passent par Anvers pour y être taillée, montée et vendue. Les bourses du diamant sont fermées le shabbat et les jours de fêtes juives et deux d'entre elles disposent d'un restaurant cacher. Il est intéressant de noter que les Juifs ne peuvent pas enterrer leurs morts à Anvers car la loi prévoit que ceux-ci soient déterrés après vingt ans, la loi étant la même pour tous. De ce fait, les Juifs d'Anvers ont un cimetière dans une petite ville en Hollande située juste après la frontière entre les deux pays. Signalons qu'il existe bien des cimetières juifs en Belgique qui disposent d'une concession de vingt ans pouvant éventuellement être prorogée.
Malgré le fait qu'une bonne partie des Juifs d'Anvers soit ce que les officiels des communautés appellent des «Juifs reconnaissables», barbus, vêtus de caftans et de chapeaux noirs, ils sont assez bien acceptés par la population locale. Bien que le parti d'extrême droite Vlaams Blok, qui compte de nombreux négationnistes de la Shoa dans ses rangs, ait obtenu pratiquement 30% des voix lors des dernières élections sur une plate-forme violemment xénophobe, il n'y a pas ou peu de signes d'hostilités émanant de la population locale. Les actes d'antisémitisme sont en général les faits de Maghrébins. Cela dit, il faut souligner que le gouvernement flamand a décidé de geler toute coopération scientifique avec Israël. Récemment, un chorégraphe flamand a clos son spectacle en brûlant deux drapeaux: l'israélien et l'américain.
Bien que toute forme d'évaluation soit extrêmement difficile et qu'aucune donnée n'ait été publiée, certaines sources estiment que le chiffre d'affaires annuel de l'industrie du diamant à Anvers pour 2003 se situait aux alentours de 36 milliards de dollars. Si tel est effectivement le cas, on comprend aisément que la ville apprécie la contribution importante des diamantaires à son bien-être financier?
Sur le plan linguistique, le yiddish est la langue la plus parlée, suivi du français et de l'hébreu. La majorité des Juifs parlent aussi flamand et néerlandais.
L'histoire d'amour entre Anvers et le diamant remonte au XVe siècle et une littérature féconde a été publiée à ce sujet. Sur le plan historique, nous nous contenterons de citer un document datant de 1447 interdisant sous peine d'amende le commerce à Anvers d'imitations de diamants, de rubis, d'émeraudes ou de saphirs. Le document spécifie encore que l'amende sera de 25 ducats, dont un tiers sera versé au régent, un autre à la ville et le dernier à l'informateur? (visiblement, la délation était encouragée, bien qu'il ne soit pas spécifié de quelle manière le chiffre 25 serait divisé par 3?).
Afin de donner une image à la fois historique et actuelle de la société juive des diamantaires d'Anvers, nous avons été à la rencontre d'un jeune chef d'entreprise, LAURENT TRAU, dont la famille est dans le commerce du diamant depuis plus d'un siècle. Adepte de l'orthodoxie moderne, membre du conseil d'administration de la synagogue Shomrei HaDat, sioniste et traditionaliste de stricte observance, marié et père de quatre enfants, M. Trau dirige sa société avec calme, détermination et succès.
En 1890, Chaim Trau est venu s'établir de Cracovie à Anvers, où il a repris l'affaire de diamants de son beau-père. A l'époque, le diamant provenait exclusivement d'Afrique du Sud et deux marchés étaient alors dominants, ceux d'Amsterdam et de Londres, où la De Beers a ouvert ses portes en 1890. Anvers était alors un marché secondaire. Comme la vaste majorité des Juifs qui s'étaient établis à Anvers au début du XXe siècle, Chaim Trau était avant tout «cliveur», travail consistant à fendre le diamant dans le sens naturel des couches lamellaires afin d'indiquer la meilleure manière de le tailler. Progressivement, l'affaire s'est développée et alors que Chaim Trau s'occupait de plus en plus du commerce du diamant à proprement parler, il a engagé des cliveurs et au début de la Première Guerre mondiale, il avait ainsi une vingtaine d'employés. Pendant la guerre, l'activité s'est arrêtée à Anvers et la famille s'est installée en Hollande, alors pays neutre. Après la guerre, la famille est retournée à Anvers et a repris les affaires, mais de manière beaucoup plus restreinte. Chaim Trau avait cinq enfants, quatre fils (dont Charles, le grand-père de Laurent, et Emmanuel, qui a été déporté) et une fille. Comme les autres commerçants, en raison de la crise internationale de 1929, il avait fermé sa fabrique de taille de diamants à Anvers même et travaillait à «la campagne». A l'époque, toute une chaîne de petits tailleurs de diamants s'était créée dans les provinces. Ces minuscules entreprises familiales fonctionnaient à la petite semaine. Le dimanche, les propriétaires se rendaient à la bourse du diamant à Anvers pour y acheter le peu de diamants bruts qu'ils taillaient pendant la semaine. Le dimanche suivant, ils vendaient à la bourse les diamants taillés et avec le bénéfice rachetaient un peu de brut. Pendant la semaine, les Juifs de la bourse faisaient alors le commerce du diamant ainsi taillé. Lorsque la Deuxième Guerre mondiale a éclaté, Charles Trau, qui était officier dans l'armée belge, a repris son service pour combattre l'Allemagne. Comme la Belgique a capitulé au bout de 15 jours, il a passé la guerre comme prisonnier militaire en Allemagne.
Après la Deuxième Guerre mondiale, Amsterdam a perdu son importance dans le marché du diamant et c'est Anvers qui, avec l'aide de la De Beers, s'est fortement développée. Il faut bien comprendre qu'à l'époque, pratiquement tout le diamant vendu dans le monde provenait d'Afrique, en particulier d'Afrique du Sud. C'est la De Beers qui regroupait toutes les pierres à Londres, où elles étaient triées par qualités et revendues dans le monde entier. Aujourd'hui, la De Beers est encore le principal fournisseur au monde de diamants bruts puisqu'elle détient environ 50% du marché.
Comment expliquez-vous qu'il y ait une si grande partie de la population juive qui soit active dans l'industrie du diamant ?
Historiquement, Amsterdam n'était pas seulement un grand centre diamantaire, c'était aussi une grande métropole juive. Ces deux éléments réunis expliquent un peu le fait que tant de Juifs se soient intéressés au commerce du diamant. Le slogan d'une ancienne publicité d'une société diamantaire résume parfaitement l'esprit de l'époque: «Une fortune au creux de la main». Dès que les Juifs étaient chassés ou devaient fuir, ils pouvaient prendre avec eux leurs diamants, c'est-à-dire leurs avoirs, leur outil de travail et de survie et recommencer une autre vie ailleurs. Il est intéressant de savoir qu'avant la guerre, seulement 13% des patrons et 22% des ouvriers travaillant dans le monde du diamant étaient juifs. Jusqu'au début des années 60, l'industrie du diamant était plus flamande que juive. La majorité des gens étaient arrivés à Anvers après la guerre et, n'ayant pas pu faire d'études, ils étaient entrés dans le commerce du diamant par facilité. Il n'y avait pas besoin de diplômes ou de grand capital. Le métier de cliveur existait encore contrairement à aujourd'hui où, en raison des nouvelles techniques au laser, le clivage des pierres ne se fait plus manuellement mais avec un équipement très sophistiqué. A l'époque, il fallait une journée pour cliver une pierre alors que l'équipement actuel permet d'en traiter une centaine quotidiennement. Ce métier était alors bien payé et intéressant. De nombreuses personnes ayant débuté dans l'industrie du diamant en tant que cliveurs sont aujourd'hui encore actives dans le domaine, mais la jeune génération est nettement moins intéressée. Pour Anvers, cette nouvelle réalité constitue un grand changement.
Comment votre société est-elle devenue si importante ?
Nous sommes devenus clients de la De Beers en 1947. Mon grand-père et son frère cadet se sont associés et, en tant qu'anciens militaires, ont obtenu le privilège d'acheter ce que la De Beers appelle une «vue». Tous les anciens officiers belges ou anglais, qui étaient diamantaires, ont ainsi reçu une «vue» de la De Beers après la guerre. Ce système des «vues» constitue une offre faite par la De Beers dix fois par an à des clients sélectionnés, à qui elle montre un lot de diamants qu'ils achètent. A ce jour, seules 80 sociétés de diamantaires sont accréditées par la De Beers pour ces achats. D' merci, l'affaire a pu se développer et, dans les années 60, un troisième frère qui vit à New York s'est également joint à la société. Depuis quelques années, la jeune génération a repris le flambeau. Aujourd'hui, la taille ne se fait plus exclusivement à Anvers, les petites pierres (en dessous d'un carat) sont taillées principalement en Inde, où il y a plus d'un million de tailleurs, et les plus grosses pièces à Anvers, en Israël et à New York. Notre compagnie a aussi une taillerie en Israël et nous sommes présents à la bourse de Ramat Gan. Notre clientèle s'étend à travers le monde entier, y compris dans certains pays arabes. Depuis trois ans, nous nous sommes lancés dans une ligne de bijouterie qui s'appelle Scintilla Monaco (où se trouve notre centre de design et de production des bijoux) qui, pour l'instant, est vendue principalement au Moyen-Orient, en particulier à Dubaï, en Arabie saoudite et au Japon. Je me rends une fois par an à Dubaï, où je n'ai jamais rencontré de problème, bien que mon passeport soit rempli de tampons israéliens. A ce jour, nous employons environ 250 personnes.
Votre société fait partie du club finalement très fermé de celles qui sont accréditées chez De Beers. Cette autorisation est-elle valable tant que votre société existera ?
Les accréditations ne sont octroyées que pour une période de deux ans. A l'issue de ces deux années, une nouvelle sélection se fait en fonction de toute une série de paramètres, dont les plus importants sont: le marketing, la stratégie commerciale de la société, ses capacités de vente, de fabrication, d'innovation dans le commerce du diamant, sa surface financière et sa présence sur les marchés internationaux. Autre aspect déterminant, le degré de transparence de la société, qui se situe sur deux nivaux: la provenance des fonds et le suivi de chaque pierre vendue. En effet, il existe tout un marché parallèle, celui des diamants dits de «conflits», qui proviennent de certains pays africains et dont le produit des ventes sert à l'achat d'armes et au financement de différents types de guerres. Un teneur de «vues» n'a bien entendu pas le droit de traiter de tels diamants et doit pouvoir retracer l'historique de chaque diamant, depuis la mine jusqu'au magasin. Cela dit, il y a sur le marché des diamants russes commercialisés par une société d'État, Alumrossa, qui en a le monopole et qui vend à qui bon lui semble sans pratiquer ce système d'accréditation.
La société juive des diamantaires anversois est actuellement en pleine mutation puisque la jeune génération ne semble pas très intéressée par la profession. Comment expliquez-vous ce phénomène et comment voyez-vous l'avenir ?
La nouvelle génération a souvent regardé le métier de diamantaire comme un travail imposé à ses parents en fonction des circonstances de la vie. Ayant l'opportunité de faire des études, les jeunes préfèrent se diriger vers des professions libérales comme avocat ou médecin. Cela dit, le monde du diamant a aussi changé. Pour gérer une affaire correctement, il faut faire appel à l'informatique, pour la gestion du stock et bien d'autres tâches, et pour nos affaires, nous avons engagé un avocat à plein temps. Il faut aussi dire que se lancer dans le commerce du diamant en créant une affaire aujourd'hui est beaucoup plus difficile qu'avant. Une nouvelle structure demande aussi beaucoup de capital et n'est pas facile à mettre sur pieds. Pour l'instant à Anvers, nous sommes donc confrontés à un grand problème généré par une autre réalité qui vient s'ajouter à toutes les difficultés dont je vous ai parlé. Avant la Deuxième Guerre mondiale, il n'y avait pour ainsi dire pas de hassidim à Anvers. Ils sont venus s'installer ici après la guerre et, grâce à l'industrie du diamant, ils ont pu gagner leur vie assez facilement et de manière suffisante pour nourrir leurs familles nombreuses. Aujourd'hui, après deux ou trois générations dans le monde du diamant, les jeunes, voyant que le métier est devenu difficile et que les exigences sont de plus en plus importantes, ne souhaitent ou ne peuvent pas entrer dans l'industrie. Il existe donc tout un pan de la jeune génération qui vit dans des conditions très difficiles, aux frais de la société.
En votre qualité de jeune Juif, leader communautaire et chef d'entreprise en Belgique, comment voyez-vous l'avenir ?
Je pense qu'il y a un grand avenir dans le monde du diamant à condition d'être doté d'une structure très solidement établie. En tant que Juif à Anvers, je ne pense pas que l'avenir soit rassurant. On ne sent pas encore de la crainte, mais un début d'insécurité. La plupart des jeunes de mon âge ont fait des études universitaires, ne sont pas entrés dans le commerce du diamant et ne vivent plus à Anvers. Certains ont déménagé à Bruxelles, où ils ont trouvé du travail, mais la majorité est partie vivre aux USA ou en Israël. Les chiffres sont parlants: parmi ceux qui étaient dans ma classe à l'école Tachkemoni, sur vingt élèves, nous ne sommes que trois à avoir repris l'affaire familiale dans le diamant. Les autres, également issus de familles de diamantaires, ont décidé de ne pas suivre les traces de leurs parents. Beaucoup de petites entreprises ont été fermées ou rachetées par des grands groupes de l'Inde. Certains Hindous sont établis à Anvers depuis 40 ans, comme par exemple nos voisins de bureaux, propriétaires de la société Rosy Blue, l'un des plus importants groupes de diamantaires de l'Inde. Anvers est devenu le siège principal de leurs activités. Dans cette enclave du monde des diamants, chapeaux noirs, costumes-cravattes à l'européenne et Hindous se mélangent joyeusement. La langue dominante est le yiddish et, lorsque les Hindous concluent une affaire entre eux, ils disent simplement: «mazal et beraha», la formule juive qui, depuis des siècles, conclut toute transaction irrévocable dans le monde du diamant.
Encouragerez-vous vos enfants à devenir diamantaires ?
Je ne les découragerai pas et ne les pousserai pas dans cette direction. Toutefois, comme j'en ai quatre, je serais heureux si l'un d'eux voulait entrer dans la société familiale. Mais pour l'instant, ils sont encore un peu jeunes pour faire ce genre de projets d'avenir.
La vie juive anversoise
La vie communautaire juive à Anvers est subdivisée en deux grandes institutions communautaires: Shomrei HaDat, dont les membres s'identifient avec la tendance de l'orthodoxie moderne, et Machsiké HaDass, communauté strictement orthodoxe. A cela s'ajoute une synagogue sépharade de rite portugais et une pléthore d'oratoires et de Bateï Midrashim (centres d'études et de prières) reliés à des groupes hassidiques dont les plus importants sont: Bobov, Sadz, Klausenburg, Berditchev, Chassideï Alexander, Belz, Gour, Loubavitch, Satmar, Thortkow et Wiznitz.
L'histoire de la communauté juive remonte bien avant l'indépendance de la Belgique en 1832. Toutefois, c'est cette même année qu'une synagogue a été inaugurée et une seconde en 1844, la première étant devenue trop exiguë. Les années qui suivent l'indépendance ont vu Anvers gagner en importance. Vers la fin du XIXe siècle, de nombreuses communautés juives d'Europe de l'Est ont été victimes de pogromes et beaucoup de Juifs sont venus s'installer à Anvers? en route vers l'Amérique, où ils ne sont jamais partis. La communauté juive d'Anvers a donc été obligée d'établir les infrastructures nécessaires à son essor. Afin de nous parler brièvement de la vie communautaire à Anvers, nous avons rencontré M. Willy Kahan, vice-président de la communauté Shomrei HaDat.
Pouvez-vous en quelques mots nous décrire la vie juive et communautaire à Anvers aujourd'hui ?
La ville compte deux communautés principales qui sont orthodoxes et deux autres communautés importantes, l'une sépharade et l'autre géorgienne, qui ont des accords avec notre communauté en ce qui concerne les services de la cacherouth, etc. Tous les Juifs inscrits dans une communauté à Anvers sont membres d'une communauté orthodoxe, même si eux-mêmes ne le sont pas personnellement. Notre communauté est extrêmement bien structurée, nous disposons de l'ensemble des services communautaires du plus haut niveau. En 2004, nous avons célébré les 50 ans de la reconstruction de la communauté Shomrei HaDat, dite de la Van Nestleistraat qui, depuis lors, porte le nom de Synagogue Romi Goldmuntz. Je tiens à rappeler que le 14 avril 1941, le lundi de Pâques, le quartier juif avoisinant la gare a été agressé par une bande de jeunes sympathisants des Allemands, en grande majorité des membres de la SS flamande. Ils se sont dirigés vers les synagogues de la Osttenstraat tout en s'attaquant, en chemin, à des commerces appartenant à des Juifs. Puis ils ont pillé les synagogues de la Van Nestlei et de la Oostenstraat, profané les objets de culte et mis le feu aux synagogues ainsi qu'à la maison du rabbin. En 1954, la synagogue de la Nestleistraat, totalement rénovée, a été inaugurée à nouveau. Notre communauté a également sous son égide la plus grande école juive d'Anvers, Tachkemoni, mondialement connue pour son niveau d'enseignement général et de l'hébreu en particulier. Notre communauté dispose aussi d'un home pour personnes âgées assez important et d'un service social du nom de «La Centrale de bienfaisance» qui, malheureusement, est de plus en plus sollicité. Cet organisme dispose d'un service de distribution de repas cachers à domicile qui livre aussi des repas aux prisonniers juifs lorsqu'il y en a. Nous avons aussi une école très spécialisée pour une quarantaine d'enfants mentalement ou physiquement handicapés tout à fait extraordinaire puisqu'il y a pratiquement un enseignant par enfant. Pour terminer, je citerai notre centre communautaire Romi Goldmuntz avec sa grande salle de fêtes, sa crèche et ses installations sportives, y compris un stade de sport, un terrain de tennis et une salle omnisport qui appartient à notre Club Maccabi.
Comme nous le voyons, la vie juive à Anvers offre toutes les facilités pour y vivre agréablement, y compris un certain nombre de restaurants cachers où des plats traditionnels juifs et diététiques de tout premier ordre sont au menu. Mais les Juifs y ont un avenir pour autant ?
Les écoles juives d'Anvers
L'une des spécificités de la vie juive anversoise réside dans le fait que pratiquement 90% des enfants vont dans une école juive. A Anvers, il y a deux grandes écoles, Tachkemoni, qui fonctionne sous l'égide de la communauté Shomreï HaDat, et Yesodei HaTorah, qui dépend de la communauté de stricte orthodoxie Machsiké Hadass et qui a une section séparée pour garçons et un Beth Yacov pour les filles. Il existe une école plus petite Yavnéh. Ces trois écoles sont reconnues par l'État. De plus, chacune des dynasties hassidiques possède sa propre petite école privée, certaines ne dispensant qu'un enseignement religieux, d'autres offrant également des études laïques.
Tachkemoni était le chef de la garde du roi David (Samuel II, 23-8). Aujourd'hui, mondialement connue et servant d'exemple et de référence dans le domaine de l'éducation juive, l'école Tachkemoni a été fondée en 1920 uniquement comme école de garçons dotée d'une seule petite classe.. Bien qu'en 1928 l'école ait déménagé dans de grands locaux, ce n'est qu'en 1939 qu'elle a ouvert ses portes aux filles. Dès 1942, ses bâtiments ont servi à d'autres usages et ce n'est qu'en 1947 que Tachkemoni a pu être en quelque sorte inaugurée à nouveau. Progressivement, l'école s'est développée et depuis 2001, elle jouit d'une série de nouvelles installations. Aujourd'hui, environ 800 élèves y suivent leur scolarité, l'enseignement suit les programmes de l'État. Sa spécificité concerne l'étude très poussée de l'hébreu afin que ses élèves puissent, s'ils réussissent les examens psychométriques requis en Israël, intégrer n'importe quelle université israélienne et faire leurs études en hébreu sans la moindre difficulté. Au cours d'une brève conversation avec la directrice de l'école Mme Gladys Lehrer, celle-ci nous a notamment déclaré: « Notre but est de nous assurer que nos élèves quittent notre école en étant aussi bien à l'aise dans les patrimoines culturels belges que juifs. Nous pensons que l'identification avec Israël et le renforcement de l'identité juive passent par la connaissance approfondie de la langue hébraïque. C'est dans cet esprit que nous préparons la nouvelle génération».
|