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Sommaire Art et Culture Printemps 2006 - Pessah 5766

Éditorial
    • Éditorial - Avril 2006 [pdf]

Pessah 5766
    • Liberté et Responsabilité [pdf]

Politique
    • Mirages de l\'unilatéralisme [pdf]

Interview
    • La situation sécuritaire [pdf]
    • Courage et Détermination [pdf]
    • Judaïsme et excellence [pdf]

Judée-Samarie
    • Honte et Espoir [pdf]

Analyse
    • Renaissance du califat ? [pdf]
    • Multiculturalisme et Antisémitisme [pdf]
    • Trop tard ? [pdf]

Reportage
    • Naissance à Jérusalem [pdf]

Recherche scientifique
    • Piquer sans aiguille [pdf]
    • Traces suspectes [pdf]

Art et Culture
    • Le Musée Menahem Begin [pdf]
    • Montparnasse déporté [pdf]

Espagne
    • Jérusalem et Madrid 1986 - 2006 [pdf]
    • Comunidades Judias de España [pdf]
    • Paella cachère ! [pdf]
    • Juif et Basque [pdf]
    • Les Juifs et la littérature contemporaine [pdf]
    • Esther Bendhan [pdf]
    • Museo Sefardi [pdf]

Éthique et Judaïsme
    • Dura Lex - Sed Lex [pdf]

La mémoire courte
    • Les événements du mois d'avril [pdf]

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Le Musée Menahem Begin

Harry Hurwitz

Par Roland S. Süssmann

Récemment, un concierge à la retraite du célèbre Hôtel King David de Jérusalem m'a raconté l'histoire suivante. Dans les jours qui ont suivi l'élection de Menahem Begin au poste de Premier ministre, la résidence officielle nécessitant quelques travaux de réfection, M. Begin habitait à l'hôtel. Avec son petit déjeuner, il avait l'habitude de recevoir les quotidiens du matin. Or un jour, les journaux faisant défaut, un de ses adjoints a téléphoné au concierge pour qu'ils lui soient livrés rapidement. Ce qui ne fut pas fait. Menahem Begin a alors lui-même téléphoné et dit, en plaisantant: «Dois-je faire sauter cet hôtel une seconde fois pour me faire entendre et obtenir mes journaux ?». C'était bien la seule personne au monde - l'ancien commandant de l'Irgoun - qui pouvait tenir ce genre de propos.
Depuis quelques années, une série d'institutions ont ouvert leurs portes en Israël, avec pour but de perpétuer l'enseignement et le message politique de certains dirigeants disparus qui ont marqué l'histoire récente de l'État juif. C'est ainsi qu'il existe des centres du nom de Moshé Sharret, David Ben Gurion, Yigal Alon, Itzhak Rabin, etc. Ces institutions fonctionnent un peu dans l'esprit des grandes bibliothèques présidentielles américaines. Ouvertes au public, elles mènent parallèlement une action éducative qui se traduit généralement par la publication d'ouvrages relatifs aux personnages ou en rapport avec des projets de portée nationale ou internationale dans lesquels ces hommes d'État ont été impliqués.
Au moment où le plus important parti du camp nationaliste en Israël, le Likoud, est en perte de vitesse et semble avoir abandonné une grande partie de son influence sur la scène politique, il nous a semblé utile de rappeler brièvement quelle idéologie il est sensé défendre. Pour ce faire, nous avons décidé de publier un reportage sur le Menahem Begin Heritage Center de Jérusalem. Cette institution, véritable mémorial vivant de l'un des plus grands dirigeants d'Israël, est à la fois un musée, un centre de recherche, une bibliothèque et un centre éducatif. Partie intégrante des archives de l'État d'Israël, elle détient tous les éléments liés directement ou indirectement aux activités de Menahem Begin.
Il est impossible de résumer la vie et l'action de Menahem Begin en un seul article, mais il n'est pas inutile de rappeler les principales étapes de sa vie et l'essentiel de son action politique. Né en 1913 à Brisk (Brest-Litovsk), en Pologne, M. Begin a été arrêté par les Soviétiques à Vilna en 1940, où il dirigeait le Bétar. Il a été condamné à huit ans de prison pour activité antisoviétique dans un camp de travail en Sibérie. Libéré, il est arrivé en 1942 en Eretz Israël en uniforme et en tant que membre de l'armée libre polonaise. Son combat dans la clandestinité au sein du groupe Etzel (Irgoun Tsvaï Leumi) de 1943-48, son action politique dans l'opposition dès la création de l'État jusqu'à son élection au poste suprême de sixième Premier ministre en 1977, la signature du traité de paix avec l'Égypte (1979), le bombardement des installations nucléaires Osirak en Irak (1981), la guerre du Liban (1982) et finalement sa démission (1983) après le décès de son épouse Aliza, sont des événements qui jalonnent les livres d'histoire. Toutefois, l'élément dominant de toute son action est sans aucun doute le rappel permanent et la concrétisation sur le terrain du droit inaliénable des Juifs sur la totalité de la terre d'Israël. Afin de réaliser son idéal, Menahem Begin a lancé le mouvement de peuplement de la Judée-Samarie et du district de Gaza. Malgré la liquidation récente des habitations juives de cette région, aujourd'hui plus de 200'000 Juifs vivent sur les terres ancestrales de Judée et de Samarie, répartis dans plus de 150 agglomérations. Bien que l'on puisse dire sans hésiter que l'ensemble de la classe politique a trahi son héritage et que les dirigeants actuels du Likoud envisagent sérieusement d'abandonner d'importantes parcelles des terres d'Israël aux Arabes, certes pas de manière unilatérale, ses enseignements méritent toute notre attention car ils restent plus actuels que jamais. C'est dans cet esprit que nous avons entrepris la visite du Mémorial Begin, que nous vous invitons à suivre attentivement avec nous aujourd'hui.
En arrivant, ce qui frappe le visiteur est la beauté du site où se trouve le centre. Situé à l'extrémité sud du quartier historique de Yémin Moshé créé par Sir Moses Montefiore, le bâtiment moderne offre une vue imprenable sur les murailles de la Vieille Ville de Jérusalem et le désert de Judée, jusqu'à la mer Morte. L'exposition interactive qui retrace la vie de Menahem Begin débute par un petit film dans lequel un speaker de la télévision israélienne annonce le décès du grand homme et où l'on voit le défilé des 90'000 personnes venues lui rendre un dernier hommage à la Knesset. Le visiteur est ensuite invité à découvrir les différentes étapes de sa vie, de sa naissance à Brisk juqu'à son décès. Le parcours est jalonné d'extraits de films, d'interviews, d'interventions en public et à la Knesset rappelant ainsi les fabuleux talents d'orateur qui permettaient à Menahem Begin de galvaniser son auditoire. Progressivement, le visiteur entre dans le salon où est exposé le mobilier original du petit deux-pièces de la rue Rosenheim à Jérusalem que la famille Begin occupait depuis 1946 et au sujet duquel Menahem avait l'habitude de dire: «je ne le quitterai que pour m'installer dans la résidence du Premier ministre.». Puis on assiste à la préparation de l'attentat contre le quartier général des forces britanniques établi à l'Hôtel King David, on peut entendre un enregistrement de l'avertissement téléphonique lancé au commandement anglais avant l'attentat. Suivent l'affaire de l'Altalena et le discours à la nation prononcé par Menahem Begin le jour de la renaissance de l'État d'Israël. Le visiteur est ensuite invité à suivre l'action politique de ce grand leader en sa qualité de chef de l'opposition, puis en tant que membre du gouvernement d'Union nationale pendant la Guerre des Six Jours et enfin le jour de son arrivée au pouvoir. La visite continue par la réception du président Sadate à Jérusalem, la signature des Accords de Camp David, l'obtention du Prix Nobel de la Paix et finalement sa démission après le décès de son épouse Aliza. Le tour du mémorial se termine par une sortie lumineuse sur une terrasse avec une vue panoramique sur Jérusalem, la capitale d'Israël réunifiée.
Afin de mieux comprendre dans quel esprit ce mémorial fonctionne, nous avons été à la rencontre de ZVI H. HURWITZ, président exécutif de la Menahem Begin Heritage Foundation, qui s'était lié d'une amitié profonde avec Menahem Begin dès leur première rencontre en 1946. Z. Hurwitz a été appelé à travailler avec lui dès le lendemain de son élection au poste des responsabilités suprêmes d'Israël.

Lorsque l'on évoque le nom de Menahem Begin, la première pensée qui vient à l'esprit est bien entendu le traité de paix avec l'Égypte. Or avec le temps, il s'est avéré que l'Égypte n'est pas le partenaire pacifique escompté. Pensez-vous que cette évolution soit dans l'esprit des accords signés par Menahem Begin ?

Au cours des cinq guerres qu'Israël a subies durant les premières décennies de son existence, l'Égypte était son ennemi le plus puissant. Depuis 1977, toute forme de conflit armé avec cet important État arabe a été évitée. Aucun soldat juif n'a été tué sur le front sud, ce qui n'est pas une petite affaire. De plus, sur le plan historique, c'est cet accord qui a véritablement changé le Moyen-Orient et ouvert les portes du monde arabe à Israël. Il est vrai que la Jordanie a mis très longtemps à formaliser le traité de paix avec nous. Quant au Liban, il était à deux doigts de signer un accord. En 1981, M. Begin a rencontré secrètement Bashir Jemayel, avec qui un traité de paix devait être formalisé. A la dernière minute, ayant peur pour sa vie, le leader libanais avait refusé de signer l'accord. Quelque temps après, il a été assassiné au Liban. Begin a été très contrarié par cette affaire. Quant à la Syrie, aucune négociation n'étant possible sans l'abandon du Golan, il n'y avait donc rien à faire.

Pourquoi M. Begin n'a-t-il jamais annexé la Judée, la Samarie et Gaza ?

Parce que son gouvernement ne l'aurait pas suivi dans cette démarche.

Pourquoi n'a-t-il pas peuplé massivement les hauteurs du Golan et le Goush Katif ?

Aucun gouvernement ne l'a fait et je pense qu'il s'agit là d'une grave erreur nationale et idéologique.

L'expulsion des Juifs de Goush Katif est un acte totalement contraire à l'idéologie et aux enseignements de Menahem Begin. Or, pendant toute la période qui a précédé cette évacuation forcée, votre institution est restée étonnamment discrète, pour ne pas dire totalement silencieuse. Pourquoi ?

Nous avons annoncé officiellement que nous ne participerions pas au débat politique qui s'était installé à ce sujet dans la nation. Toutefois, nous avons rappelé avec force à toutes les parties le message de Menahem Begin qui était d'éviter à tout prix toute violence entre Juifs. Je rappellerai que pendant l'affaire de l'Altalena (voir SHALOM Vol.43), le leader de l'Irgoun avait refusé toute forme d'opposition armée, car il était évident pour lui que celle-ci aurait mené à une guerre civile. Je pense pouvoir dire sans me vanter que si l'opération de Goush Katif s'est déroulée sans conséquences violentes, c'est aussi parce que nous y avons apporté notre modeste contribution en rappelant tout le temps ce message essentiel de Begin: «Jamais de guerre civile entre frères en Israël».

Au cours des nombreuses années où vous avez côtoyé le grand homme, vous avez vécu des situations exceptionnelles en sa compagnie. Pouvez-vous rapidement nous citer votre meilleur souvenir ?

Pendant les négociations pour la signature du traité de paix avec l'Égypte, le président Carter faisait la navette entre Jérusalem et le Caire. Afin de régler les derniers points en suspens, le président américain s'est alors rendu à l'aéroport du Caire pour rencontrer le président Sadate. Menahem Begin était rentré chez lui, à Jérusalem, où mon épouse Freda et moi-même l'avions rejoint. A un moment, le téléphone a sonné et mon épouse a répondu. C'était le président Carter qui appelait du Caire. Menahem Begin a pris l'écouteur et nous l'avons entendu remercier le Président à plusieurs reprises. Puis il a raccroché et s'est tourné vers nous en disant, la larme à l'?il: «Nous avons la paix».

Politiquement, il est aujourd'hui admis que c'est Menahem Begin, en parlant d'autonomie pour les palestiniens, qui a jeté les bases pour un potentiel état palestinien. Qu'en est-il en réalité ?

Ceci ne correspond en rien à la réalité. Begin avait présenté un programme dans lequel il était question d'une autonomie pour les Arabes vivant en Eretz Israël. Il parlait d'un conseil administratif de 13 départements. Il n'a jamais eu l'idée de créer un parlement, des ministres, un président ou toutes les autres institutions palestiniennes mises en place par les gouvernements de la gauche israélienne. Dès son arrivée au pouvoir en 1992, la gauche israélienne a facilité la création d'une autorité équivalant pratiquement au gouvernement d'un état potentiel. L'autonomie que Begin avait envisagée se limitait à la population locale et concernait exclusivement les domaines économiques, éducatifs, etc. Il n'a jamais été question de concéder une autonomie sur des terres d'Eretz Israël aux populations arabes qui y vivaient.

Aujourd'hui, vous dirigez le Menahem Begin Heritage Center dont vous avez assuré la fondation, l'établissement, la construction et l'installation depuis 1992. Quel est le but principal de votre institution ?

Nous avons de nombreuses activités, mais je pense que l'essentiel peut se résumer à une action éducative ayant pour but de renforcer les éléments les plus sacrés et les plus fondamentaux qui constituent la base même de l'État juif. Par le biais du musée, nous présentons de manière moderne et efficace, c'est-à-dire par un ensemble de courtes séquences multimédias, la vie et l'?uvre de Menahem Begin. Notre institut de recherche est avant tout orienté vers les études de plusieurs aspects de la société israélienne, dont l'intégration des nouveaux immigrants de l'ancienne URSS et d'Éthiopie constitue un aspect important. Nous avons des séminaires, des cours, des conférences et même un système de bourses pour des étudiants ou des projets de recherche. Une fois par an, nous attribuons le Prix Begin, qui récompense des personnes particulièrement méritantes et dévouées à la cause juive et à Israël. De plus, nous avons une activité unique en Israël qui est la Knesset des jeunes. Il s'agit d'une véritable reproduction de la salle de la Knesset, installée dans notre auditorium, où de jeunes collégiens ou académiciens viennent débattre d'un sujet choisi. Cette activité se déroule dans l'esprit de Menahem Begin et de la manière dont il participait à la vie politique, soit de façon déterminée et dans le respect permanent de ses adversaires.
Le centre contient aussi une synagogue active dans laquelle se déroulent des offices trois fois par jour et qui sert aussi de lieu pour des cours et des conférences religieuses. Lorsqu'il était Premier ministre, Menahem Begin avait établi un groupe d'étude de la Bible qui se réunissait chez lui tous les samedis à l'issue du Shabbat. Chaque semaine, un rabbin ou un grand penseur venait donner un cours sur la Parasha de la semaine auquel Begin participait personnellement en posant des questions et en faisant ses commentaires. Il y a quelques années, un homme m'a téléphoné pour me voir et à ma grande surprise, il m'a apporté deux cartons contenant 120 cassettes audio sur lesquelles tous ces cours étaient enregistrés. Chaque jeudi soir, nous avons donc un cours sur la Parasha de la semaine dirigé par un jeune professeur de l'Université hébraïque de Jérusalem, Micha Gutman, suivi en moyenne par 80 à 120 personnes. En raison du grand nombre de participants, les cours se tiennent dans notre auditorium.
Je terminerai en disant que depuis l'ouverture, nous avons accueilli des milliers de visiteurs et qu'il n'est pas rare que certains jours, nous recevions 300 soldats qui suivent une formation d'officier. Je regrette que pour l'instant la visite du musée ne fasse pas encore partie du programme scolaire obligatoire, bien que de nombreux écoliers en provenance de toutes les parties d'Eretz Israël s'y rendent régulièrement.

Nous le voyons, le Centre Menahem Begin mérite une visite. En conclusion, écoutons un extrait du discours de récipiendaire du Prix Nobel qui résume l'esprit dans lequel Menahem Begin, le combattant, le révolutionnaire, l'homme d'État, le parlementaire et le grand orateur, a mené toute son action: «Je suis venu du pays d'Israël, de la terre de Sion et de Jérusalem. Je suis ici en toute humilité et avec honneur en tant que fils du peuple juif et membre de la génération de la Shoa et de la rédemption».

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