Occupation ? | ||
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Par le Professeur Moshé Sharon * | ||
Le terme «occupation» est utilisé depuis de nombreuses années pour décrire la gestion israélienne de la Judée et de la Samarie conquises du royaume hachémite, et de la bande de Gaza conquise de l’Égypte au cours de la guerre des Six Jours. Dans le langage tortueux des médias et des politiciens, en Israël comme dans la plupart des pays du monde, ces régions sont qualifiées de «territoires palestiniens occupés». Comme si Israël avait conquis en 1967 un pays du nom de Palestine et s’en était approprié les terres ! Il est désolant de constater que peu de lecteurs et d’auditeurs, en Occident comme en Orient, sont conscients du mensonge qui sous-tend l’usage de ces termes. Dans le contexte du conflit israélo-arabe et dans l’arène du Moyen-Orient en général, ceux qui se servent de ces termes n’essayent pas de vérifier leur pertinence, ou n’y sont pas intéressés. Dans la plupart des cas, cette attitude est loin d’être innocente mais relève d’une démarche délibérée répondant à un agenda politique pro-arabe. Si l’usage de termes incorrects comme «la démocratie dans les pays arabes», «élections libres», «droits des femmes», etc. était uniquement dû à l’ignorance de la culture arabe et islamique, ce phénomène aurait été acceptable quoique regrettable. Toutefois, lorsque l’emploi de ces concepts issus du vocabulaire de la civilisation occidentale sert de support à d’importantes décisions politiques, il devient extrêmement dangereux. Certains maniements de langage représentent un mélange d’ignorance et de distorsion de faits historiques et sont nourris par la haine d’Israël et une bonne dose d’antisémitisme. L’usage du terme «occupation» appartient à cette catégorie; exclusivement réservé à Israël, il ignore toutes les autres parties du monde occupées. Ainsi, l’Allemagne a perdu quelque 115.000 km2 avec une population de 9.621.000 de personnes, régions passées sous domination russe et polonaise. Une partie de la population a fui devant l’avance des troupes soviétiques, l’autre a en majorité été expulsée après la fin de la guerre. Pour commencer, rappelons quelques faits concernant cette «occupation». La Cisjordanie a été prise à la Jordanie et non à une quelconque entité palestinienne, qui n’existait pas; quant à la bande de Gaza, elle était sous tutelle de l’Égypte. Les deux États ont occupé ces territoires au cours de la guerre israélo-arabe de 1948 et y ont régné depuis illégalement. Les Jordaniens ont même annexé la région située à l’ouest du Jourdain et l’ont appelée «la Rive Occidentale» (Cisjordanie). L’Égypte de son côté a établi son administration à Gaza. Les deux régions ont donc certes été en mains arabes pendant 19 ans, mais au cours de l’occupation jordanienne et égyptienne, nul n’a été effleuré par l’idée d’y établir un État palestinien, alors qu’un tel État aurait facilement pu être créé et reconnu, même par Israël. De plus, l’occupation jordanienne de la Cisjordanie et l’administration égyptienne de la Bande de Gaza n’ont jamais été reconnues par la communauté internationale: ce, pour la bonne raison que les deux États occupaient des territoires qui, en vertu des décisions et accords internationaux et selon la loi internationale, appartenaient au Foyer national juif. En fait, le droit à ces territoires revenait à l’État d’Israël, plus qu’à n’importe quel autre intervenant de la région, et c’est encore le cas jusqu’à ce jour. Le statut légal de l’ensemble de la Palestine a été clairement défini dans plusieurs accords internationaux. Le plus important a étéadopté à la Conférence de San Remo, après la désintégration de l’empire ottoman au cours de la Première Guerre mondiale: le 24 avril 1920, le Conseil suprême des Alliés a décidé d’attribuer le mandat sur la Palestine à la Grande-Bretagne. Un texte convenu a ensuite été ratifié par le Conseil de la Société des Nations le 24 juillet 1922 et la décision est devenue opérationnelle en septembre 1923. Dans le préambule à ce document, il est déclaré que «… les principales puissances alliées ont également convenu que la puissance mandataire serait chargée de mettre en œuvre la déclaration faite le 2 novembre 1917 par le gouvernement de Sa Majesté britannique et adoptée par lesdites puissances, en faveur de l’établissement en Palestine d’un Foyer national pour le peuple juif». La déclaration du 2 novembre 1917 est bien sûr la fameuse Déclaration Balfour, qui a reçu, dans ce document, une ratification internationale. De surcroît, à l’article 2 du document, la Société des Nations a déclaré: «Le Mandat sera chargé de placer le pays dans des conditions politiques, administratives et économiques telles qu’elles assureront l’établissement du Foyer national juif, ainsi qu’il a été stipulé dans le préambule.» Le préambule affirme clairement: «Reconnaissance a ainsi été faite du lien historique entre le peuple juif et la Palestine ainsi que des raisons justifiant la reconstitution de son foyer national dans ce pays.» Voilà les bases sur lesquelles le Mandat britannique a été établi. La Grande-Bretagne a trahi son devoir et, loin de respecter les engagements précisés dans ce document, elle a tout fait pour empêcher l’établissement du Foyer national juif; elle a finalement décidé, en 1947, de mettre fin à son mandat de façon unilatérale, abandonnant la Palestine le 15 mai 1948. Entre-temps, les Nations Unies (ayant succédé à la Société des Nations), décident le 29 novembre 1947 de la partition de la Palestine occidentale en deux États, l’un juif l’autre arabe. Cette décision est non seulement aussitôt rejetée par les Arabes, mais sept armées arabes envahissent la Palestine pour mettre un terme au jeune État d’Israël fondé le 14 mai 1948. Cette première guerre d’Israël contre toutes les armées arabes s’achève par un armistice. Une ligne est tracée sur la carte, délimitant la position des armées combattantes sur les deux fronts, à l’est et au sud, au moment du cessez-le-feu: c’est la «Ligne verte». Il ne s’agissait pas d’une frontière, ni Israël ni les Arabes ne lui attribuèrent plus de signification qu’elle n’en avait: une ligne définissant les positions des armées respectives à l’issue d’une des phases des hostilités. Il était entendu qu’elle pouvait se déplacer dans un sens ou dans l’autre si la guerre reprenait, ce qui fut le cas en 1967. A l’issue de la guerre de 1948, certaines parties du Foyer national juif furent donc occupées par la Jordanie et l’Égypte, le peuple juif étant le seul à détenir un droit de possession sur ces territoires. C’est donc Israël qui a été dépossédé, non les Arabes et certainement pas les «Palestiniens», que nul ne mentionne à l’époque. La guerre de 1967 crée une nouvelle situation sur le terrain. La ligne d’armistice de 1948-49, tracée en vert sur les cartes (et non en bleu ou en mauve), est déplacée à l’issue de cette guerre plus à l’est, sur le fleuve du Jourdain et se trouve ratifiée comme frontière internationale par l’accord de paix avec la Jordanie, en 1994. Dans le sud, la Ligne Verte est déplacée suite à la victoire d’Israël sur les Égyptiens et elle est reconnue comme frontière internationale lors de l’accord de paix entre Israël et l’Égypte en 1979. Ainsi, il n’y a plus de Ligne Verte ! Annulée par cette nouvelle guerre, elle s’est transformée en «ligne mauve» par les accords de paix. Ceux qui s’obstinent à sanctifier la Ligne Verte cultivent une image illusoire et ignorent délibérément les faits. Ils ont créé un peuple palestinien et un État palestinien derrière cette ligne sacro-sainte; mais leur réelle motivation ne découle pas tant du souci pour le bien-être des Palestiniens que du désir d’entamer le processus d’élimination du Foyer national juif. Quarante-cinq ans après le document issu par la Société des Nations à San Remo, Israël a légitimement repris possession des territoires attribués au peuple juif comme foyer juif. Que la prise de possession de sa propre patrie puisse être appelée «occupation des territoires palestiniens» dépasse tout entendement ! Le plus tragique est que les Juifs eux-mêmes ont fini par adopter cette terminologie et à en faire la pierre angulaire de leur politique nationale. Bien que tous les faits énoncés dans cet article soient parfaitement connus, tous les intervenants semblent s’accorder pour les oublier. C’est pourquoi il est indispensable de les répéter au moins aussi souvent que les mensonges proférés concernant la prétendue «occupation». La même situation s’applique à l’exigence de restitution à la Syrie du plateau du Golan «occupé» en échange de la paix. Ici encore, les faits sont bien connus mais doivent sans cesse être rappelés. La Syrie a perdu le Golan à l’issue de deux guerres qu’elle a elle-même initiées contre Israël, en 1967 et en 1973; de plus, elle s’est servie pendant des années du Golan comme immense base militaire pour lancer d’incessantes attaques contre les villages israéliens de la vallée du Jourdain et sur les rives du lac de Tibériade. Ayant perdu ce territoire à cause de son agression, la Syrie ne peut le revendiquer de même que l’Allemagne n’a pu récupérer les territoires perdus au cours de la Deuxième Guerre mondiale. Si la Syrie souhaite la paix avec Israël, ce n’est pas à Israël de «payer le prix» de cette paix, mais à la Syrie elle-même, qui désire l’acheter; il est clair que dans le souk politique du Moyen-Orient, seul Israël détient la marchandise appelée «paix». Le principe du prix à payer par la Syrie pour la paix avec Israël doit être affirmé avec force; la Syrie doit non seulement renoncer aux territoires perdus dans les guerres de 1967 et de 1973, mais elle doit se montrer disposée à d’autres concessions pour prouver que son désir de paix est authentique. Un dernier mot à propos d’occupation: si ce terme peut être légitimement utilisé dans l’histoire du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, il doit l’être à propos de l’occupation islamique. Au VIIe siècle, les armées de l’Islam s’élancèrent d’Arabie et occupèrent par la force du glaive de vastes territoires, soumettant les peuples, détruisant cultures et langages au nom d’Allah et de son Prophète. Leurs descendants souhaitent maintenant conquérir l’Europe ! *Le professeur Moshé Sharon, autorité mondiale de la langue et de la civilisation arabes et professeur d’Histoire islamique à l’Université hébraïque de Jérusalem. |