Jérusalem | |
Par Roland S. Süssmann | |
Depuis cinq ans, Jérusalem est gouvernée par un maire dynamique, M. EHUD OLMERT, député du Likoud à la Knesset et ancien détenteur de plusieurs portefeuilles ministériels. Le 10 novembre prochain, M. Olmert se présentera à nouveau devant l'électorat hiérosolymite tant juif qu'arabe et les pronostics laissent entendre qu'une victoire fulgurante lui est promise.
De tout temps, Jérusalem, la capitale juive, a fait l'objet de la convoitise des chrétiens et des musulmans. Notre époque n'échappe pas à cette jalousie, tout est mis en ýuvre afin que la souveraineté juive, étendue sur la ville réunifiée depuis l'agression arabe de 1967 contre Israël, soit remise en question et finalement abandonnée. Le Vatican propose "l'internationalisation de Jérusalem", l'idée que le tombeau de Jésus soit placé sous l'autorité juive lui étant insupportable. Pour les Arabes, Jérusalem, qui n'est pas citée une seule fois dans le Coran, est devenue un cheval de bataille visant à remettre en question toute la légitimité et l'existence même de l'État juif. Heureusement, sur le terrain, les faits sont bien différents. Depuis la Guerre des Six Jours, la capitale du peuple juif connaît un essor fabuleux et constitue, aujourd'hui, la plus grande agglomération d'Israël tant sur le plan territorial que sur celui de la population. Grâce au développement des nouveaux quartiers juifs, la majorité des résidents juifs de Jérusalem vit actuellement dans la partie de la ville libérée en 1967. Pouvez-vous en quelques mots nous dire ce qui a changé à Jérusalem en cinq ans "d'administration Olmert" ? Beaucoup de choses ont changé dans ma ville. Sur le plan politique, une modification fondamentale s'est opérée. En effet, jusqu'en 1993, Jérusalem ne faisait pas partie de la négociation politique menée par Israël avec ses voisins arabes. Il n'y avait aucun doute que Jérusalem était une ville réunifiée sous la seule souveraineté d'Israël. Personne n'imaginait que cet état de choses serait remis en question. Malheureusement, dans le cadre des Accords d'Oslo, le Gouvernement israélien a accepté de négocier Jérusalem, et ce pour la première fois depuis 1967. Depuis ce jour, la perception de ce qui se passe dans la ville a changé. Tout mouvement, toute transformation que nous entreprenons sont devenus sujets d'une attention internationale bien particulière. Hier, l'idée que Jérusalem resterait éternellement juive et que par conséquent son essor ne pouvait en rien affecter des négociations ou un processus de paix, était généralement admise - certes à contrecýur. Aujourd'hui, les choses sont complètement différentes. Le résultat des Accords d'Oslo fait qu'à chaque modification, la communauté internationale, et ce souvent au plus haut niveau, nous dit: "Vous n'avez pas le droit de procéder unilatéralement à ce genre de changements, Jérusalem est négociable et par conséquent, vous n'y êtes plus totalement souverains." Un autre bouleversement de taille réside dans la manière dont la ville est perçue en Israël même. En effet, les relations entre les communautés juives orthodoxes et non religieuses sont exacerbées de façon extrêmement virulente. Au cours des cinq dernières années, j'ai dû agir dans un climat de suspicion qui alimentait la crainte que la ville ne soit progressivement "conquise" par la communauté orthodoxe. Cette idée totalement fausse a pris des proportions telles qu'il est aujourd'hui généralement admis que les non religieux quittent la ville et que les orthodoxes s'y installent en masse. Ceci ne correspond absolument pas à la réalité des faits sur le terrain. Au cours des dernières années, les membres de la communauté orthodoxe sont partis en très grand nombre et les estimations pour les vingt-cinq années à venir prévoient que la proportion de Juifs orthodoxes n'évoluera pas de manière significative à Jérusalem. Il ne faut pas oublier que cette communauté est constituée de beaucoup de familles nombreuses et que le coût de l'immobilier en ville devient de plus en plus lourd. De plus, il existe de nombreuses possibilités de logements nettement moins chères dans des petites localités situées à quelques kilomètres de la capitale. Cela étant dit, ce préjugé faux et négatif affecte de façon très considérable Jérusalem et son image dans le pays. Je m'efforce donc de lutter contre cet état de choses afin d'attirer de nouveaux habitants, des industries, des capitaux, etc. En ce qui concerne l'essor de la ville en tant que tel, qu'avez-vous concrètement réalisé de plus que votre prédécesseur Teddy Kollek ? Sans vouloir porter préjudice à l'action de Teddy Kollek qui fut maire de la ville de 1966 à 1994, je vous dirai simplement que depuis mon élection, j'ai dépensé 2.5 milliards de shekalim (env.US$.700 millions) pour améliorer l'infrastructure de la capitale. Ce montant est supérieur à la totalité des investissements réalisés dans ce domaine par Teddy Kollek durant les vingt-huit années de son mandat. Cela étant dit, je tiens à souligner qu'au cours des cinq dernières années, notre effort principal s'est porté sur l'amélioration de l'infrastructure urbaine. En ce qui concerne Jérusalem, on entend souvent parler d'archéologie, de politique, d'histoire ou de religions. Mais la question qui en définitive préoccupe la majorité des habitants de la ville se résume à des problèmes concrets: "Comment circuler en ville sans être régulièrement bloqué dans la circulation ? Quelle est la qualité des services urbains et éducatifs ? Dans quel état sont les parcs ? Quel est l'essor de la ville sur le plan commercial et technologique, par conséquent de l'emploi, etc. ? Nous avons transformé des parties importantes de la ville et ne sommes qu'au début de nos projets dont la réalisation se fait d'ailleurs avec intensité, vigueur et rapidité. Pouvez-vous nous donner quelques exemples ? Je citerai tout d'abord la nouvelle route (Nr. 4) qui traverse Jérusalem du nord au sud et qui porte le nom de Menachem Begin. Cette autoroute transversale, inaugurée en juin 1998, est révolutionnaire à plusieurs titres. Tout d'abord, elle désengorge le centre ville d'un énorme trafic et permet à l'utilisateur de traverser la capitale en quelques minutes. Elle est à quatre voies dans chaque direction, mesure 6.7 km et compte 4 tunnels de 380 m chacun ainsi que plusieurs ponts. Jusqu'à présent, il n'y avait pas de tunnels en Israël et Jérusalem était une ville sans ponts. Nous sommes sur le point de terminer une autre autoroute, la Nr 1, d'une grande importance pour toute la population résidant au nord de la cité et sous peu, nous allons commencer les travaux de la route Nr 9 qui permettra au trafic se dirigeant vers le nord de Jérusalem de ne plus emprunter l'arrivée principale de la capitale, mais de se rendre directement vers le nord sans entrer en ville, en passant par Motza, Ramot et Pisgat Zeev. De plus, nous allons développer le chemin de fer entre Jérusalem et Tel-Aviv. Comme je vous l'ai dit, nous ne sommes qu'au début de la réalisation de nos projets. Nous allons agrandir le quartier de Giloh vers le sud en direction de Bethléem. Nous comptons renforcer la présence juive dans le secteur de Pisgat Zeev en le développant dans la direction nord-est. C'est aussi là que nous allons construire une nouvelle zone industrielle. N'oublions pas que chaque route que nous construisons, chaque amélioration et chaque sou que nous dépensons pour perfectionner l'infrastructure renforcent la souveraineté israélienne sur la ville. Il s'agit là de la mise en place d'une politique que j'ai définie dès mon entrée en fonctions et qui, aujourd'hui, s'est progressivement concrétisée. Je tiens à souligner que nous avons également entrepris beaucoup de choses pour améliorer la qualité de vie des résidents non-Juifs de la ville. Ils bénéficient également directement des progrès et des transformations réalisés et ce bien entendu au même titre que les Juifs. Récemment, le monde s'est à nouveau offusqué de la mise en place du "Grand Jérusalem" qui, d'un certain point de vue, réunit en plus de la capitale quelques municipalités environnantes. En quoi ce projet consiste-t-il exactement ? Toute cette affaire a été gonflée de façon totalement disproportionnée. Il faut bien comprendre qu'il ne s'agit pas, et je le regrette, d'un geste politique ni bien entendu d'une annexion déguisée de certaines parties de la ville qui se trouvent à l'extérieur de Jérusalem. Notre but est d'exploiter de façon plus rationnelle le rôle de la capitale en tant que métropole centrale. Certaines agglomérations des alentours de Jérusalem utilisent des services de la ville comme par exemple les pompiers, la distribution de l'eau, etc. Nous avons établi une organisation faîtière qui agit en tant que comité de coordination entre la municipalité de Jérusalem et les communes concernées. Cette affaire est donc d'ordre purement technique. Il semble que la construction de Har Homa soit stoppée. Qu'en est-il en réalité ? Bien que situé à Jérusalem, Har Homa est un projet national et non municipal. Le Premier ministre a promis à plusieurs reprises qu'avant l'an 2000, les premiers habitants seraient installés à Har Homa. J'espère qu'il tiendra parole mais pour l'instant, la construction est effectivement gelée. En tant que Maire, je ne peux rien entreprendre pour faire avancer les choses, mais je mets mon influence politique à contribution afin de convaincre le gouvernement de redémarrer la construction au plus vite. Je suis absolument persuadé qu'aujourd'hui, il est inévitable que Har Homa soit construit. Il faut bien comprendre qu'il en va de Har Homa comme de Beth Orot et de tous les autres projets immobiliers à Jérusalem. Ce qui compte, ce ne sont pas les déclarations d'intention mais ce que nous entreprenons. Seuls les faits sur le terrain détermineront l'importance de notre souveraineté sur la ville. Si les différents projets gouvernementaux à Jérusalem ne sont pas réalisés, ils constitueront un signe de faiblesse dont aussi bien les Arabes que le reste du monde tenteront de prendre avantage. Il est connu que les Arabes de Jérusalem construisent illégalement un peu partout dans Jérusalem. Quelles mesures prenez-vous pour contrer ce genre d'activités ? J'ai tenté d'expliquer à la population arabe de Jérusalem qu'en ce qui concerne la construction, elle dispose des même droits que les Juifs et que tous les autres résidents. Toutefois, il faut que les choses se passent dans le cadre de la loi et que les chantiers ne soient entrepris qu'une fois les permis de construire accordés. Lorsque nous constatons qu'un bâtiment a été érigé illégalement, nous émettons un ordre d'évacuation et de démolition et, s'il n'est pas suivi, nous procédons à la suppression de l'immeuble en question. La fameuse "Maison d'Orient", qui est en fait le bureau officieux de l'OLP à Jérusalem, existe toujours et est encore active. Or l'un des grands thèmes du Likoud pendant les dernières élections était la liquidation de cette institution. Comment expliquez-vous que la "Maison d'Orient" fonctionne toujours ? C'est vrai, la "Maison d'Orient" existe toujours. Toutefois, depuis l'arrivée au pouvoir du Likoud, elle est devenue pour ainsi dire insignifiante. Elle a perdu toute sa "splendeur" et n'est plus qu'une sorte de coquille pratiquement vide. La décision de sa fermeture appartient au gouvernement qui, pour des raisons qui lui sont propres, a préféré appliquer une politique qui a rendu ce centre pour ainsi dire sans valeur et certainement sans importance. Tout indique que vous remporterez aisément les prochaines élections municipales. Pouvez-vous nous dire quels sont vos projets d'avenir pour Jérusalem ? Notre but, pour les prochaines années, est de multiplier et de fortifier la majorité juive dans la capitale. Pour ce faire, nous avons déjà démarré de nombreux programmes d'expansion de la ville et de construction. Nous mettons tout en oevre pour développer le parc industriel et offrir de plus en plus d'emploi. Paralllelement, nous renforcons le monde académique, en particulier dans les domaines scientifiques et technologiques, afin d'être à même d'offrir du personnel qualifié aux industries de haute technologie que nous souhaitons voir s'établir à Jérusalem. Je veux aussi que ma ville devienne progressivement le plus grand centre culturel du pays et dans ce but, j'ai d'ores et déjà mis en chantier un certain nombre de projets. Avez-vous été particulièrement ému d'être le Maire de Jérusalem à l'occasion des cinquante ans de l'État ? Etre le Maire de Jérusalem constitue une sorte de "célébration permanente". Bien entendu, j'ai été très heureux de me trouver au centre des festivités du Jubilé qui se sont avant tout déroulées à Jérusalem. Cela étant dit, je pense que le fait d'être à la tête de la Mairie de Jérusalem me fait ressentir tous les jours que je me trouve au centre du monde et que j'ai le privilège de faire face à un défi permanent, aussi motivant que passionnant. |