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Sommaire Shalom Tsedaka Printemps 2001 - Pessah 5761

Éditorial - Printemps 2001
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Les chiens de l’espoir

Par Roland S. Süssmann
En hébreu, chien se dit «kelev», ce qui, selon le Talmud, réunit les deux mots «koulo» et «lev» signifiant «tout en cœur». Cette expression trouve toute sa valeur et son application dans l’action menée par la FONDATION KEN qui, sous la direction de Ouri Beckmann, dresse ce qu’elle appelle simplement «des chiens d’assistance». Les chiens d’aveugles sont certainement les animaux d’accompagnement les plus connus, mais la fondation dispose d’une gamme de chiens qu’elle dresse et met à la disposition non seulement de personnes aveugles, mais également aveugles et sourdes, malvoyantes et multi-handicapées, partiellement handicapées, autistes, etc. Ces chiens, spécialement entraînés pour chaque cas spécifique, rendent des services inappréciables à leurs maîtres défavorisés. L’on peut se poser la question de savoir pourquoi ces chiens agissent de la sorte: par altruisme ou par intérêt ? La relation homme-animal repose sur une confiance et une loyauté mutuelles absolues ainsi que sur une dépendance réciproque totale. Le maître garantit au chien le gîte, le logis ainsi que l’attention et l’affection dont il a besoin, en retour de quoi le chien prête ses yeux, son ouïe et ses habilités de se mouvoir à son partenaire humain.
Cette formation particulière exige du moniteur une patience sans bornes. La discipline est sévère, mais les animaux sont traités avec gentillesse et ne sont jamais punis. Un bon comportement est toujours récompensé et quand un chien ne répond pas à un ordre, celui-ci est simplement répété.
Outre le travail formidable de dressage et d’apprentissage mené par Ouri Beckmann, la fondation Ken compte une autre force motrice en la personne de son co-fondateur, Moshé Midler, lui-même malvoyant et handicapé.
Moshé, dont les problèmes physiques résultent d’un manque d’oxygène à la naissance, ne se considère pas handicapé, mais simplement limité dans ses possibilités. Dès l’âge de cinq ans, réalisant sa «différence», il a décidé de tout mettre en œuvre afin de mener une vie aussi normale que possible et très jeune, il a choisi de consacrer son existence à l’aide de son prochain…, moins «chanceux» que lui. Après des études universitaires, Moshé s’est spécialisé en musicologie et a enseigné la musique à des enfants aveugles. Estimant avoir un rôle à jouer et surtout être dans l’obligation d’apporter sa contribution au bien-être de la société, il parcourt le monde entier, voyageant seul avec son chien, pour expliquer, faire connaître et collecter des fonds pour la fondation Ken, qui servent à dresser des chiens et à apprendre aux personnes qui les reçoivent à vivre et à fonctionner avec eux. «Il faut bien comprendre que quelqu’un qui nous donne de l’argent n’accomplit pas seulement un acte de charité, il offre également à une personne limitée la possibilité de reprendre confiance en soi, d’avoir une nouvelle vie, active et heureuse. Notre action constitue un partenariat entre le donateur, le dresseur, le chien et la personne adoptée qui peut ainsi retrouver l’espoir, la joie de vivre et surtout mener une vie digne, active et constructive.»
Mais comment cette passionnante aventure a-t-elle commencé ?
En 1990, Moshé cherchait un chien. Il entra en contact avec Ouri qui dressa un chien «sur mesure», un labrador, adapté à ses besoins, lui permettant ainsi d’être soulagé dans de nombreuses tâches quotidiennes astreignantes pour lui. Le simple fait de sortir une bouteille du frigidaire constitue une opération difficile pour Moshé: sur un seul commandement, son chien, Lou, va chercher la boisson et la lui apporte. Cet exemple démontre combien ces chiens sont utiles non seulement dans la rue et en public, mais aussi à la maison. C’est ainsi que des chiens pour sourds réveillent leur maître dès que le réveil sonne ou avertissent celui-ci lorsque la sonnette de la porte retentit. Pour des personnes ayant des difficultés à se déplacer, les chiens sont dressés à aller ouvrir la porte du domicile. De plus, le chien doit pouvoir définir lui-même quels bruits sont importants et le cas échéant y réagir avec fiabilité: lors d’une alerte au feu, par exemple, il doit être capable de reconnaître le type d’alarme et attirer immédiatement l’attention de son partenaire humain et lui faire comprendre la nature de l’urgence.
Au vu du succès de ce dressage, Ouri et Moshé décidèrent de s’associer et de lancer la fondation Ken qui s’est fixé pour but de dresser et de former des chiens adaptés aux besoins de chaque personne handicapée. A ce jour, la fondation a 45 chiens en formation, dont six sont dressés pour venir en aide à des personnes sourdes et aveugles. A cet égard, il est particulièrement intéressant de noter que, selon les besoins, le chien peut être dressé pour reconnaître certains signes du langage des sourds-muets qui, lorsqu’ils sont également aveugles, ne peuvent communiquer que par le toucher. Ouri et son équipe ont aussi constaté que les chiens ont également un don de perception extraordinaire, qui ne peut pas être expliqué rationnellement. Ils sont à même de détecter et de prévenir une crise d’épilepsie entre trois et treize heures avant son déclenchement et ils arrivent même à signaler une crise d’hypoglycémie dans les trois heures précédant un coma diabétique. Ils peuvent déceler certaines maladies qui rongent les arbres, qualité très appréciable en Israël où les arbres jouent un rôle primordial dans l’équilibre écologique du pays. Les Arabes en sont d’ailleurs bien conscients puisque, dans le cadre de leurs activités terroristes régulières, l’allumage des feux de forêts est quasiment systématique.
En ce qui concerne la sélection des chiens, celle-ci se fait en fonction de leur pedigree dès le troisième ou quatrième jour de vie. Le chiot est soumis à un certain nombre d’examens spécifiques, mis au point par Ouri. Après quelques semaines, l’animal sélectionné passe une deuxième série de tests et si ceux-ci sont concluants, le chien est intégré dans un programme éducatif de base d’une année et placé dans une famille de tutelle. Un éducateur canin habitue l’animal aux réalités de la vie quotidienne les plus diverses. Le chien n’agit pas par instinct et ce n’est qu’après cette phase que le dressage en tant que tel peut commencer et que l’on détermine pour quel genre de personne handicapée chaque chien a les meilleures dispositions. Au fur et à mesure, l’animal est dressé afin d’être progressivement capable d’apporter une aide spécifique au type de handicapé qui lui convient le mieux: aveugle, aveugle et sourd-muet, autiste, etc.
Lorsque le chien est prêt à être remis à son nouveau maître, une période de formation et d’adaptation mutuelle est nécessaire. Celle-ci se fait en coopération directe avec Ouri et son équipe, d’abord au centre canin, puis petit à petit au domicile du nouveau propriétaire. De plus, une formation permanente et évolutive du chien se fait au fur et à mesure que les besoins de son maître changent. Par exemple, il est courant de devoir apprendre au chien à enlever les chaussures d’une personne qui, soudain, ne peut plus se baisser, ce sans la mordre et sans trop tirer sur la jambe, ramasser les objets tombés, etc. Une formation de six mois d’éducation intense, dont le coût s’élève à US$.30’000.- par chien, est nécessaire pour en faire un partenaire de confiance.
Outre l’histoire de Moshé qui, grâce à son chien et bien entendu à sa volonté communicative, vit une vie pleine, active et constructive, les anecdotes magnifiques, émouvantes et surprenantes vécues avec les chiens dressés par Ouri et son équipe sont nombreuses.
J’ai choisi de rapporter ici deux exemples révélateurs. L’un concerne la petite Lise âgée de six ans qui, paralysée d’une main, a également une faiblesse musculaire au niveau de la nuque: sa tête, qui tombe régulièrement sur la gauche, risque de l’étouffer. Un chien est actuellement dressé à remonter automatiquement la tête dès que celle-ci bascule. De plus, pendant la nuit, la petite Lise doit être tournée toutes les deux heures ce qui, pour les parents qui travaillent, est un véritable enfer, les nuits étant épuisantes. Le chien qui sera affecté à Lise est actuellement dressé afin que, sur un simple signal acoustique déclenché automatiquement toutes les deux heures, il tourne l’enfant. Ceci permettra aux parents de dormir sans inquiétude. L’autre exemple est l’histoire de M. Assi Bitton, qui fut grièvement blessé à l’armée en portant une charge particulièrement lourde. Abandonné de tous dans son malheur, il n’avait qu’un seul souhait: avoir un chien. Grâce à Ouri, il a eu Rambo, un magnifique Bull-Mastiff qui, depuis, ne l’a jamais quitté. Outre les nombreux services que lui rend Rambo, depuis qu’il l’a rencontré, l’état général de Assi s’est amélioré de manière tellement spectaculaire qu’aujourd’hui, il sert d’exemple dans les cliniques de physiothérapie.
L’anecdote suivante illustre particulièrement l’intensité de la relation qui existe entre Assi et Rambo. Lors d’une sortie en ville, la chaise roulante d’Assi s’est renversée et il s’est retrouvé sur la route sans pouvoir se relever. Rambo s’est alors immédiatement couché à côté de sa tête, au risque d’être écrasé, pour le protéger jusqu’à ce qu’une voiture s’arrête et aide son maître. Il faut bien comprendre que pendant de nombreuses années, Assi ne vivait que complètement couché sur le dos. Aujourd’hui, il se déplace en chaise roulante, il est marié, père d’une petite fille et a résumé son changement de situation en ces termes: «Lorsque quelqu’un est dans le noir et qu’il voit un rayon de lumière, il revit. Pour moi, Rambo a été comme un néon allumé dans mon obscurité». Assi va raconter son histoire dans les écoles, car dans la société israélienne, la valeur du chien n’est pas réellement appréciée, l’image du berger allemand tenu en laisse par le nazi étant toujours omniprésente dans les esprits. Assi met tout en œuvre pour que ces idées préconçues changent, notamment auprès des jeunes enfants. Son but, comme celui de Moshé, de Ouri et de tous ceux qui travaillent avec eux, tel Amnon Tocker, est de faire comprendre, par un travail éducatif important, que l’animal peut être au service de l’homme non pas comme une bête de somme, un instrument de terreur ou de torture, mais comme un assistant et un ami.


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